Derrière ce titre à rallonge, voici l’histoire de ma découverte de la ville de Karlsruhe. Et, à la fin, je suis trempée jusqu’aux os, planquée dans ce qui est sûrement l’un des musées les plus bizarres que je n’aie jamais vus. En chemin, il y a une jolie promenade, et une déambulation dans une petite ville allemande qui a vu passer quelques personnages célèbres : Carl Benz (le papa des Mercedes Benz), Heinrich Rudolf Hertz (le papa des ondes hetrziennes) ou Karl Drais, l’inventeur de ce qu’on connaît maintenant comme la draisienne mais qui portait autrefois le nom de vélocipède. Ding. Il n’en fallait pas plus pour aiguiser mon envie de pédaler.
Car, avant de plonger vraiment dans Karlsruhe, il faut que je vous dise une chose qui n’est pas un secret : j’aime le vélo. Sauf que, ces derniers mois, j’ai dû y aller doucement, bébé oblige. Les pneus de mon beau course sont complètement à plat, et je peine à trouver le temps pour sortir mes autres vélos. Alors, quand une occasion se présente, justement, hé bien je saute en selle. Me voilà donc pour une semaine en Allemagne, le petit monstre déposé chez ses grands-parents. Alors, comment profiter de ma liberté retrouvée dans la ville de Karl Drais ? Hé bien en trouvant un vélo, forcément ! Et bon sang que ça fait du bien de sentir ses cuisses travailler, les cheveux au vent. Bref, voilà comment je n’ai pas pu m’empêcher d’aller faire un tour, et il aurait été dommage de s’en priver.
Car il faut dire une chose, le vélo est omniprésent dans les villes allemandes, et en faire y est très agréable. Voitures et piétons respectent les cyclistes, les voies sont bien aménagées, fléchées, et très souvent séparées des voitures. L’Allemagne, jusqu’à présent, m’a toujours semblée un régal pour les cyclistes, qu’ils soient touristes ou habitants.
Cette petite introduction faite, revenons au début de l’histoire. Karlsruhe est juste de l’autre côté de la frontière française, à trois heures de Paris en TGV. C’est statistiquement l’une des villes les plus ensoleillées d’Allemagne, mais manque de bol, il fait tout gris quand j’y suis.
Je me promène un peu dans le jardin botanique puis dans les rues du centre-ville. Il faisait un temps superbe en France, je n’avais pas envisagé qu’il puisse faire moche à Karlsruhe. Quelques heures après mon arrivée, me voici donc à Primark, essayant de dégoter un pull et un k‑way. C’est la période des soldes, il faut fouiller dans le maigre choix qu’il reste. J’hérite d’un k‑way noir (ouf !) en taille 48 (zut), ayant malencontreusement cru qu’il s’agissait d’un 38... Mais qu’importe, pour quelques euros, je suis parée pour survivre à la pluie, direction le marché de la place Gutenberg !
Karlsruhe est une ville jeune, qui fête ses 300 ans cette année. Voilà, en 1715, y a un mec qui s’est endormi dans la forêt et qui a rêvé d’un château rayonnant tel le soleil, et d’une ville autour dont les rues représenteraient les rayons. Du coup, bah, il a construit la ville là où il avait fait la sieste, avec un plan basé sur son rêve : des rues en étoile qui partent du château.
La ville a proposé l’achat de plaques aux habitants. Celles-ci décorent plusieurs rues. Pour une centaine d’euros, chacun peut passer un message, déclarer sa flamme, souhaiter un anniversaire...
Je me promène dans les ruelles et ateliers d’artistes de Durlach. Ce fut autrefois la résidence des margraves, avant que l’un d’eux ne fasse une sieste et déplace sa cour. Durlach n’est devenu un quartier de Karlsruhe qu’en 1938 mais c’est aujourd’hui le plus peuplé.
Reichardtstraße 22
76227 Karlsruhe – Durlach[/pullquote]
Et c’est là que ce trouve la Turmberg, une petite colline de 256m qui domine la ville, offrant une vue à 360° sur la Forêt Noire, Karlsruhe et ses alentours. Un petit train à crémaillère (le plus vieux funiculaire encore en service d’Allemagne) me dépose au pied de la tour. Il est possible d’y accéder en marchant, si on est motivé par quelques centaines de marches !
Retour dans le centre de Karlsruhe. La ville est en travaux pour quelques mois encore, le temps d’enfouir le tramway. Du coup, ils en profitent pour réorganiser les quartiers et bouger quelques maisons.
Bon, vous vous douterez que c’est une plaisanterie.
Pour l’été, jusqu’à fin septembre, le ZKM (« Zentrum für Kunst und Medientechnologie » ... « Center for Art and Media », quoi) a proposé à plusieurs artistes de faire des installations en ville sur le thème des travaux de construction. L’exposition The City is the Star – Art at the Construction Site propose donc, entre autres, cette oeuvre de Leandro Erlich intitulée « tirée par les racines » et installée au milieu du chantier de la Marktplatz. L’effet est saisissant !
Lorenzstraße 19 – 76137 Karlsruhe
Les horaires / Les tarifs
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Et parlons du ZKM, justement. C’est un lieu un peu spécial, où toutes les formes d’art ont leur place. En ça, j’aurais tendance à penser qu’il est fait pour tous, et même pour les enfants. En ce moment, et pour 300 jours, c’est « Globale », une exposition qui s’intéresse à la mondialisation. Ainsi, dans le hall, le week-end de ma visite, se tenait un tribunal où étaient jugés les crimes du XXème siècle (pollution, extermination du monde animal, etc.).
Juste à côté, Tetsuo Kondon propose une oeuvre monumentale : il a recréé un nuage, dans lequel on pénètre par une rampe, avant de se retrouver au-dessus. Il y fait extrêmement chaud, c’est étouffant d’humidité, mais l’expérience est d’autant plus intense.
Je poursuis ma visite avec d’autres œuvres, questionnant elles aussi le monde moderne, comme Ryoji Ikeda qui s’intéresse aux données.
Une éclaircie !
Le temps de regarder le plan pour repérer une promenade sympa, et me voilà partie sur un vélo loué à l’hôtel. Karlsruhe regorge de pistes cyclables, et sa banlieue n’est pas en reste. Les allemands aiment pédaler et marcher, ils ont donc des chemins et pistes vraiment bien aménagés. Tout est fléché, on sillonne les champs loin des voitures. Je croise nombre de familles parties faire leur promenade du week-end. Bref, l’Allemagne est un vrai paradis du vélo, et je le vérifie un peu plus à chaque coup de pédale !
A une dizaine de kilomètres au Sud de Karlsruhe, je fais un premier arrêt à Ettlingen. Le centre piéton est adorable. Des petits ponts, des maisons colorées, des fleurs, tous les ingrédients du charme sont présents. Je soupçonne bon nombre d’habitants de Karlsruhe de faire l’aller-retour à Ettlingen pour une promenade sur les pavés et une glace au bord de l’eau...
Je reprends le vélo et poursuis mon chemin. J’ai pour projet d’aller jusqu’à Bad Herrenalb. Une piste cyclable permet de rejoindre la ville depuis Karlsruhe en traversant la forêt. Je me mets dans la roue d’un couple de VTTistes et me laisse guider... Jusqu’à la première grosse côte. Car oui, ça va monter tout du long et mon vélo trop grand pour moi n’est pas des plus pratiques. Qu’importe, je les laisse me semer et profite de l’air frais !
Je pédale le nez en l’air, chantonnant les chansons que j’ai tout le temps en tête lorsque je fais du vélo. Je chantais cette chanson, je n’connais rien de plus beau.
De temps à autres, je regarde un peu le ciel qui commence à sérieusement s’assombrir. Alors que je m’arrête pour regarder une petite carte et voir si je suis loin d’une ville, un homme s’arrête à ma hauteur. Il parle autant anglais que je parle allemand, mais on réussit à se comprendre. Il me croyait perdue, voulait m’aider à trouver mon chemin. On échange un peu sur les endroits à voir. Il va boire des coups avec des copains à lui. Il me propose de le suivre pour passer la côte qui s’annonce interminable, mais je lui explique que je passe mon temps à m’arrêter pour faire des photos. Nous nous quittons sur un signe de la main. Je le regarde s’éloigner en danseuse, en me disant que c’était la gentillesse incarnée, ce monsieur.
Je continue de pédaler, quand je sens quelques gouttes. J’accélère un peu le rythme, appuyant chaque coup de pédale dans cette éternelle illusion qu’on aura ainsi une chance d’échapper à la pluie. Quelques minutes plus tard, j’ai réalisé que le nuage me rattrapait. Je m’arrête sous un arbre quelques minutes pour ranger mon appareil photo, sortir la housse antipluie de mon sac photo, et mon super K‑Way acheté chez Primark (non, je ne suis pas sponsorisée...). Je nage dedans (sic) mais qu’importe, il me protégera le temps de rejoindre la ville la plus proche. Je ressers la capuche et repars de plus belle.
Il tombe maintenant des cordes (des hallebardes, des chiens, des chats, et 30 millions d’amis). Je baisse la tête et plisse les yeux pour essayer de voir quelque chose entre la pluie qui m’arrive dans le visage, et mes lunettes couvertes de gouttes. Je trace. J’entends le tonnerre, ça donne encore un peu plus de force à mes mollets. Il y a quelque chose de grisant (autre que le ciel) à ce moment précis, un petit plaisir enfantin à pédaler le plus vite possible, une course effrénée dont le seul moyen de sortir gagnante est de la prendre à la légère. Après tout, mon matériel photo est en sécurité dans mon sac, et j’ai un k‑way. Un k‑way... Tiens, c’est marrant, j’ai l’impression d’être mouillée quand même...
J’arrive enfin à proximité d’une ville. Je la traverse, cherchant un lieu où m’abriter. Je repère un auvent et m’y engouffre. Enfin au sec, je peux constater la puissance de la pluie qui s’abat sur le Bade-Wurtemberg.
Je pose mon vélo contre un mur, retire mon sac, mon k‑way. Et là, je vérifie que je n’hallucinais pas : je suis complètement trempée !
J’échange ma chemise contre le pull sec qui est dans mon sac ; mon pantalon séchera sur moi. Il me faut quelques minutes pour comprendre que la chose que j’ai prise pour un k‑way doit en fait être une veste de sudation. Et c’est encore aujourd’hui ma seule théorie sur pourquoi ce k‑way n’était pas imperméable.
Me voilà donc trempée, à regarder la pluie tombée. J’observe autour de moi. De la ferraille, des trucs bizarres. Je suis dans l’entrée d’un musée fermé et poussiéreux. Peut-on parler de sérendipité quand il s’agit de voyage ? L’endroit me fascine. Quelqu’un semble avoir amassé des quantités impressionnantes de choses métalliques en tout genre.
Un char, une pompe à essence, un wagon de tramway, des jouets... Une plaque indique Fahrzeugmuseum Marxzell, 3600m². Je ferai la recherche plus tard : 3600m² remplis à raz bord de véhicules en tout genre. C’est le musée dont me parlait le cycliste rencontré plus tôt, il semblait beaucoup l’impressionner. En fait, c’est une famille de syllogomaniaques qui a rempli un entrepôt entier ! Et, mine de rien, les avis sur Tripadvisor sont positifs ! (et j’ai maintenant envie d’en voir l’intérieur !)
Après avoir observé cet étrange musée, je me décide à sortir ma carte. Je suis donc à Marxzell, à 8 km de Bad Herrenalb et à 22km de Karlsruhe. Il pleut averse, je ne finirai pas mon trajet, c’est sûr. D’après la carte, il y a une station de train à proximité. Alors à la première accalmie, je parcours la ville à la recherche de la gare, priant pour qu’elle soit pourvue sinon d’une pièce fermée, au moins d’un auvent.
J’attends le train, pousse mon vélo à l’intérieur, et regarde le soleil réapparaître quelques instants plus tard...
Carnet Pratique
Comment venir : Karlsruhe est très bien desservie par le TGV (3h depuis Paris, mais il y a aussi des directs depuis Lyon, ou la possibilité de prendre une correspondance à Strasbourg). Du coup, l’aller-retour se fait bien pour un week-end.
Où dormir : Je logeais au Berliner Hof, un hôtel qui n’a pas forcément un grand charme mais qui a toutes les qualités qu’on attend d’un bon hôtel, à savoir des chambres propres, un bon petit déjeuner, un emplacement central et du personnel sympa ! (et des locations de vélos !) Bref, de toute façon, c’est ce qui se fait de mieux sur Karlsruhe !
Où manger :
- Vogelbräu Karlsruhe : l’une des plus vieilles brasseries de la ville avec son choix de plats allemands (et badois) traditionnels
- Kaisergarten est un restaurant familial, réputé pour son brunch, avec une jolie terrasse
- Kap : un restaurant actuel en plein dans une ancienne zone industrielle devenue ateliers d’artistes
Où boire un verre :
- P10 city beach : du sable sur le sol, des strandkorbe (souvenez-vous de Sylt !), des cocktails, et tout ça sur le toit d’un parking !
- Der Kleine Ketterer pour une bière et une part de gâteau (ils font aussi restaurant)
Plus d’articles sur le Bade-Wurtemberg et la Forêt-Noire
Retrouvez mes incontournables pour un séjour dans la Forêt-Noire, ainsi des mini-guides pour les autres villes du Bade-Wurtemberg : Stuttgart, Fribourg-em-Brigau, Baden Baden et plein d’autres.
Plus d’infos sur le site de l’Office National Allemand du Tourisme.
Le projet #JaimeLAllemagne est le fruit d’une collaboration entre le Collectif des blogueurs voyage et l’Office National Allemand du Tourisme. Tous les choix éditoriaux des billets produits suite à ce voyage me reviennent.
15 commentaires
Très bel article, ça donne envie de jeter un oeil par là-bas ! 😉
^^ Oui, je me suis amusée à parler de ce « lieu étrange » mais y’a vraiment de jolies choses à voir en chemin !
Génial cet article et ces anecdotes 🙂 Cela me donne envie de faire du vélo !
ça me manque tellement de ne plus en faire tous les jours...
Toutes tes escapades en Allemagne me donne envie d’aller y faire un tour. Qui l’eut crû ?!? 🙂
Franchement, c’est vraiment sympa l’Allemagne ! *
Un article comme si j’y étais ! Merci pour le partage, j’ai passé un agréable compagnie avec toi à vélo. Mention spéciale à ta description de la pluie et ses « cordes (hallebardes, chiens, chats, et 30 millions d’amis) ».
Ah, le plaisir de faire du vélo sous la pluie...
Les images sont magnifiques en tout cas !
J’ai adoré le « Il tombe maintenant des cordes (des hallebardes, des chiens, des chats, et 30 millions d’amis », j’ai bien ri, merci pour ce chouette article.
😉
J’aime cette région d’Allemagne ... Le Bodensee aussi 😉
Je rêve ou c’est Madame Oreille sur la 2 ???
Oui oui, un reportage qui date d’un an et demi, j’étais bouffie (enceinte 😉
Ces villes allemandes qui ressemblent à de minuscules villages piégés dans le temps me font toujours un grand effet <3
Je me suis mis au vélo récemment (sur l’Ile d’Oleron), c’est vrai que je devrais en faire plus souvent, c’est plus sympa que la voiture que je déteste, et ça va nettement plus vite que nos deux pattes quand même...
Tout ca pour dire, photos très sympa et récit rigolo (je t’imagine dans une course effrenée contre l’orage...)
Ces photos sont superbes ! Ça donne envie d’en découvrir plus 🙂
J’aime quand je dois aller sur Google Map pour situer un endroit. Ça veut dire que j’ai appris et découvert quelque chose qui m’était inconnu ! 🙂 Merci !
Si j’ai bien reconnue la chanson « j’ai attrapé une mouche en roulant sur mon vélo... » moi aussi j’adore la fredonner quand je pédale !