Récit de notre immersion en famille dans le Pays Toraja, sur l’île de Sulawesi, en Indonésie.
Le Pays Toraja est un endroit « spécial », m’avait-on prévenue. Et effectivement, c’est indescriptible. Un endroit à part en Indonésie. Dans les montagnes, d’étranges maisons à l’allure futuristes se dressent au milieu des rizières. Les rites et coutumes ancestrales rythment la vie des habitants, avec en point d’orgue les cérémonies funéraires, impressionnantes.
Ma fille venait d’avoir 5 ans lorsque nous sommes parties un mois à Sulawesi. La première moitié de notre voyage fut une immersion chez l’habitant en Pays Toraja : dépaysement total !
Mes conseils pour visiter le Pays Toraja
Arrivée au Pays Toraja :
Batutumonga, chez Dinny
Nous avons rendez-vous avec Dinny et son mari, Dani, devant la porte d’embarquement, dans l’aéroport de Makassar. Ils partagent leur vie entre la frénésie de Jakarta et le calme des montagnes de Sulawesi. Issu de l’aristocratie locale, le businessman de Java a grandi au milieu des rizières. Quant à Dinny, elle est issue de la diaspora chinoise, mais le pays Toraja est devenu son chez-elle.
Ancienne banquière, elle s’occupe maintenant d’une entreprise de création textile qui aide les femmes à obtenir une autonomie financière. Et elle s’emploie aussi à soutenir le comité de tourisme local : c’est elle, notre contact sur place.
Nous allons donc passer deux nuits à Batutumonga afin de prendre nos premières marques, avant de rejoindre des familles plus modestes* pour découvrir la vie traditionnelle.
*Les familles chez qui nous avons été hébergées restent des gens aisés.
Un chauffeur nous attend à Palopo, ville côtière au centre de Sulawesi. De là, il reste un peu de route. C’est mon troisième voyage en Indonésie, et je commence à savoir une chose : on ne peut pas estimer le temps de trajet en regardant une carte. C’est d’ailleurs vrai pour de nombreux autres pays.
Pendant que Petite Oreille s’endort, nous prenons la direction de Rantepao, l’une des deux grosses villes du pays Toraja : 40 000 habitants. C’est la porte d’entrée de la région, là où convergent les routes de montagne, et c’est aussi l’endroit où l’on se ravitaille. Dinny s’arrête faire le plein de fruits et légumes sur le marché. L’occasion pour Petite Oreille, fraîchement réveillée, et moi, de nous replonger doucement dans la pratique du bahasa indonesia... Selamat sore ! Apa kabar ? Putri saya, lima tahun ! Ponctuer le texte de sourires, et accompagner la mention lima tahun de cinq doigts, une main complète pour les 5 ans de ma fille.
Les provisions faites, nous reprenons la voiture pour les derniers kilomètres sur une petite route sinueuse de montagne : direction Batutumonga. Dinny et son mari ont fait construire une belle maison moderne sur les hauteurs du village. Quatre chiens les attendent de patte ferme, dont Melo, le golden retriever, tenu en laisse par l’aide de maison, qui vit ici avec sa famille.
Il y a des chiens partout, au Pays Toraja. Ils vaquent en liberté, courent après les scooters. Dani porte un t‑shirt d’une association de protection animale. Le couple milite pour que cesse la consommation de viande de chien. Melo nous saute littéralement dessus. C’est le chouchou, le seul chien acheté à un éleveur. Mais Petite Oreille lui préfère Oisin, le chien tout noir qui lui lèche les mains et la suit partout. Melo signifie « beau », et « Oisin » désigne le cramé d’une poêle oubliée sur le feu...
Photos prises par Petite Oreille, avec des appareils jetables :
Nirma, la fille de la cuisinière, deux des chiens et la vue depuis le jardin.
Nous passons la journée du lendemain à explorer les environs. Se promener, échanger quelques mots avec les habitants, et savourer la vue. Batutumonga se trouve au pied du mont Sesean.
Depuis quelques années, le Mont Sesean est pris d’assaut par les jeunes indonésiens qui viennent, tous les week-ends, y camper et réaliser quelques selfies. Petite Oreille décrète qu’elle veut y aller, elle aussi. Je lui dis que ça doit être assez haut. Elle me rétorque que ça ne lui fait pas peur. Et effectivement, elle montera jusqu’en haut, un peu plus tard pendant le voyage...
Sur la première page de mon carnet de notes de Sulawesi, j’ai écrit : le bruit des feuilles de palmier dans le vent.
Il est des souvenirs de voyage qu’on ne peut pas partager en photo, qui ne sont pas palpables. Et qu’on oublie si l’on ne prend pas soin de les noter. Les sons en font partie. Ces ambiances qui font qu’on se sent ailleurs, instantanément.
Assise sur la terrasse, je regardais Petite Oreille jouer dans le jardin avec Nirma. Elles riaient, sous le regard protecteur d’Oisin. Il y avait cette légère brise. Les bambous qui s’entrechoquent, et ce bruissement des feuilles de palmier. Un son caractéristique. Un de ceux qui évoquent l’Asie. Un son maintes fois entendu pendant mes voyages, mais qui ne me frappe qu’à cet instant précis. Je le reconnais immédiatement, je n’ai pas besoin d’aller derrière la maison vérifier la présence de palmiers. Un son reposant. Je me sens un peu chez moi, ici.
Landorundun,
immersion dans la vie traditionnelle Toraja :
en famille dans un tongkonan
Dinny a prévu que nous passions la première moitié de notre séjour dans un petit village voisin : Landorundun. Là-bas, nous expérimenterons la vie en tongkonan. Puis nous serons hébergées dans une seconde famille, avec une maison un peu différente.
Je referme la valise. Petite Oreille grimpe dans la voiture. Direction notre nouvel hébergement !
Le tongkonan, c’est la construction traditionnelle (et ancestrale) toraja. C’est une construction en bois, sur pilotis. On la reconnait à son toit si distinctif, courbe et élancé. Autrefois, les toits étaient faits en bambou. Des milliers de morceaux de bambous imbriqués les uns dans les autres. Mais le coût de la construction en bambou est tel qu’aujourd’hui, la taule est devenue la norme, même si elle ne tient pas aussi longtemps.
Selon les légendes locales, les Torajas, « peuple des hautes terres », sont originaires de la mer de Chine. Ils seraient arrivés par la mer sur l’île de Célèbes, et leurs maisons étaient prévues pour stocker leurs embarcations : d’où ce toit, qui rappelle effectivement les proues des navires.
N’allez pas leur demander si c’est en référence à la forme des buffles, comme chez les Minangkabau. Ils n’en démordront pas ett vous expliqueront qu’ici, on parle de « bateau » pour désigner un village.
En effet, dans la langue indonésienne, on ne dit jamais le nom d’un lieu tout seul : on ajoute avant un mot précisant « ville ». Ce qui donne des phrases comme : je vais à ville La Rochelle. De la même manière, ils ne diront pas Bali ou Lombok mais pulau Bali et pulau Lombok, pour les désigner comme îles. Et au Pays Toraja, même à 1500m d’altitude, ils ne rentrent pas au village, mais au bateau.
Les tongkonans sont l’apanage des familles des hautes castes, et sont, sans surprise, un signe extérieur de richesse. Le tongkonan principal est celui qui sert d’habitation. Il est généralement assez grand, en bois sculpté et peint aux motifs symboliques traditionnels. À l’intérieur, on trouve trois pièces : deux chambres qui donnent sur la pièce commune. Aujourd’hui, il est fréquent d’agrandir les tongkonans par une extension sur le côté, ou en créant une pièce supplémentaire sous les pilotis (autrefois, c’est là que le bétail passait la nuit !).
Le tongkonan d’habitation est toujours dirigé vers le nord : vers les mers originelles et le Créateur. Face à lui, on trouve d’autres tongkonans, plus petits, qui eux sont dirigés vers le sud, au soleil toute la journée : ce sont les greniers à riz.
Les greniers à riz montrent la richesse d’un clan, bien sûr. L’autre signe extérieur de richesse est le nombre de cornes de buffle accrochées devant la maison. Mais ça, nous y reviendrons plus bas !
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- Notes de voyage – dimanche 22 septembre 2019,
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Sarjani et Suleman nous attendent devant chez eux. Ils ont un petit café-restaurant tout simple à Landorundun. Le couple de quinquagénaires ne parle pas anglais mais sait exprimer sa joie de nous recevoir. Il y a le tongkonan principal, maison d’habitation, un second tongkonan, plus ancien, un autre encore, à l’abandon, et sept ou huit petits tongkonans « greniers » en face.
Sarjani sort le café, sert plusieurs tasses. Comme d’habitude, je noie le breuvage dans le sucre pour réussir à le faire passer sans grimacer. Saya tidak suka kofi, je sais dire que je n’aime pas ça (même si c’est certainement pas très correct, grammaticalement), mais j’ai toujours peur de vexer. Heureusement que le café n’est pas fort, ici !
Sitôt les cafés bus, Sarjani veut nous présenter à sa maman. Elle est décédée la semaine passée. Nous nous dirigeons vers le tongkonan. Avant de rentrer à l’intérieur, elle nous explique que, du coup, nous dormirons dans le second tongkonan, car elle sait que ça peut être bizarre pour nous.
On retire les chaussures et on grimpe dans la maison. La maman se trouve dans la seconde chambre, celle du fond. La dépouille est enroulée dans du tissu, des mètres et des mètres de tissu. Elle est installée sur le lit. Sarjani dépose une assiette de biscuits, pose sa main sur le rouleau, sourit, et commence à expliquer à sa mère que Petite Oreille et moi allons passer quelques jours ici. Puis elle me fait signe : c’est à moi de dire un mot. Je lui dis que je suis honorée d’être ici, que j’ai hâte de découvrir le village et d’en apprendre plus sur la culture Toraja.
Photo prise au jetable par Petite Oreille
Mariage chez les Torajas
En fin d’après-midi, Sarjani nous emmène chez une autre famille du village. Dans la cour, c’est l’effervescence : tout le monde s’active à la préparation du mariage. Les décorations sont installées. Ils ont construit des estrades sous les tongkonans, mis du tissu coloré partout.
Au centre, les hommes préparent la viande. Ils mélangent herbes et morceaux de porc, puis les enfournent à l’intérieur de tronçons de bambous. C’est le pa’piong, le barbecue traditionnel. Les morceaux de bambous, ainsi remplis, seront disposés à côté du feu pendant plus d’une heure.
Plus loin, à côté de la cuisine, les femmes s’occupent du riz. Le riz est un indispensable dans la cuisine toraja, comme partout en Indonésie. Ici, la seule raison pour ne pas manger de riz à un repas, c’est de manger des nouilles.
Le geste est précis, technique : envelopper des petits tas de riz dans des feuilles de bananier, des dizaines de petites papillotes. Le riz gluant ainsi compressé donnera des petits cylindres (les lontongs), faciles à manger pour les invités. Et très bons, n’ayons pas peur de l’avouer.
Un pick-up arrive dans la cour : c’est la sono. De gigantesques enceintes sont déposées sur le sol par deux jeunes hommes surexcités. Est-ce la fête ou la perspective de l’installation musicale qui les met en joie, je l’ignore !
Et partout, les enfants courent, jouent. Petite Oreille s’est fait une copine, Putri. Elle a le regard espiègle et les dents couvertes de caries, comme la plupart des enfants en bas âge ici. Une sucette dans la bouche, elle entraîne Petite Oreille explorer les recoins de la propriété.
À la nuit tombée, Sarjani nous fait signe de rentrer à la maison avec elle. Nous la suivons. Demain, il faudra se lever tôt !
Notes de voyage – dimanche 22 septembre
Un groupe de jeunes garçons était en train d’installer l’électricité dans le vieux tongkonan lorsque nous sommes arrivées. Il fait nuit noire, et ils tirent les fils, installent les prises et les ampoules.... éclairés par leurs téléphones portables. Le tout sous la supervision de Sarjani.
Le vieux tongkonan ne servait plus vraiment, et encore moins pour recevoir des invités. Sarjani met les petits plats dans les grands pour nous accueillir !
Notes de voyage – lundi 23 septembre 2019
Nous retrouvons Sarjani et son mari pour le petit déjeuner. Ils ont mis de côté un costume traditionnel pour Petite Oreille et semblent impatients de le lui mettre ! La jupe et la tunique se portent avec des ensembles en perles : à la ceinture, autour du cou, en bandeau. S’ajoutent à ça des bracelets et un collier, de quoi ravir Petite Oreille ! (qui pose alors pour à peu près 157 photos avec Suleman et Sarjani !)
À 8h, nous prenons tous ensemble la direction de la maison des mariés. Les préparatifs se sont poursuivis tard dans la nuit, et tout est prêt à présent.
Des enfants jouent dans la cour. Presque tous portent le costume traditionnel, mais il y a d’un côté les oranges, et de l’autre les jaunes. Et ils ne se mélangent pas. Putri est en orange, c’est la couleur des enfants du village. Les enfants vont et viennent à leur guise, comme toujours.
10h, tout le monde est fin prêt. Beaucoup d’invités sont déjà là, la mariée peut sortir. Les enfants forment une haie d’honneur qui accompagne le couple d’amoureux. Il est en costume noir, elle en robe blanche. Ils grimpent dans une voiture qui attend devant, suivis de près par leurs parents respectifs, et les 4 photographes qui les accompagnent partout.
Un pick-up, décoré aux couleurs du mariage, s’arrête devant l’entrée. Les enfants s’entassent à l’arrière. J’ai un temps d’hésitation. Petite Oreille suit ses copines, alors je m’accroche à l’arrière du véhicule déjà plein, juchée sur le marchepied. Je ne sais pas où on va, je ne sais pas ce qu’il se passe. Et c’est pas franchement confortable.
Notes de voyage
10h15, devant l’église. Il y a peu de monde. Les enfants, de nouveau, ont formé haie d’honneur afin d’accompagner les mariés à l’intérieur. L’église est loin d’être remplie, il y a uniquement les parents et quelques proches, même si tout le monde est le bienvenu. La messe est dite par une jeune femme aux cheveux courts et son assistant, qui projettent un powerpoint des paroles de chansons sur le mur.
Les enfants ne sont pas restés longtemps à l’intérieur, ils préfèrent jouer dehors. Mais toujours les oranges d’un côté, et les jaunes de l’autre. Les jaunes sont moins à l’aise, moins nombreux.
Les mariés et leurs parents s’échappent dans une petite pièce, à l’arrière de l’église : c’est en costume traditionnel qu’ils rejoignent la fête, toujours avec leur haie d’honneur d’enfants.
Notes de voyage – 14h
On est à la maison, aucune goutte d’alcool, aucune chanson paillarde.
Les mariages en Pays Toraja sont déroutants. Après l’église, les mariés se sont installés à la tribune, pour plus de deux heures d’attente. Les invités, venus en nombre de tous les villages voisins, ont fini de manger, tranquillement, tandis que les mariés et leurs parents écoutaient des discours. Il s’est ensuite formé une grande queue devant eux : chaque personne présente au mariage monte sur la tribune, salue les mariés et leurs parents, puis s’en va. Oui, ils s’en vont directement après !
En gros, les invités sont venus, ont mangé, ont dit « coucou et bonne chance ! » aux mariés, et sont repartis. Déroutant. Les préparatifs semblent disproportionnés par rapport à la courte fête !
Mais il y a une explication : la cérémonie la plus importante au Pays Toraja, c’est la cérémonie funéraire.
Lebok, Lince, et tous les autres
Il n’a pas fallu longtemps à Petite Oreille pour se faire des copains : il y a des enfants partout, de tous les âges. Ils vont à l’école le matin, et passent ensuite le reste de la journée à jouer dans les rizières. Les plus grands gardent un œil sur les plus petits, mais les enfants sont très libres, ici.
Petite Oreille a particulièrement sympathisé avec Lebok et Lince, deux jeunes filles d’une dizaine d’années qui trouvaient très amusant d’aller marcher, la promenade n’étant pas très pratiquée ici, et qui étaient ravies de nous montrer plein de choses : les écoles, les rizières. Elles s’amusent à nous apprendre de nouveaux mots d’indonésien. Comme kerbau, par exemple, un mot indispensable ici : le buffle est un animal sacré chez les Torajas.
Il y a aussi Natan et Padada. Les deux frères sont inséparables, toujours en train de crapahuter quelque part dans un arbre ou sur un rocher. Car les rizières de la région sont parsemées de rochers, résultat d’une éruption volcanique (très) ancienne. Le mari de Dinny m’avait raconté, dans un grand éclat de rire, avoir réussi à persuader des touristes qu’il s’agissait en fait d’excréments de dinosaures fossilisés !
Ces rochers ont de quoi fasciner : au-delà de leurs dispositions étranges et de leurs formes, ils sont aussi très présents dans la culture toraja : les rochers abritent, en effet, les dépouilles des hautes castes. Mais nous y reviendrons plus tard, parlons encore un peu des enfants avant d’évoquer les morts !
Photo ci-dessous, en noir et blanc, prise au jetable par Petite Oreille.
L’appareil amusait beaucoup les enfants, qui ne semblaient pas trop savoir si c’était ou non un jouet, puisqu’on ne voyait pas les photos !
Dès qu’ils sont en âge, les enfants aident leurs parents. Ainsi, Yosep, 10 ans, adorable jeune garçon qui offrait des fleurs à Petite Oreille et lui tenait tout le temps la main pour traverser les rizières, avait en charge les animaux de la famille. Il allait nourrir les cochons, déplaçait le buffle d’une rizière à l’autre.
Les enfants ont ainsi des journées très chargées, avec des réveils matinaux pour l’école, mais ils apprennent naturellement à veiller les uns sur les autres. Le proverbe africain qui dit qu’il faut tout un village pour élever un enfant serait également vrai ici. Au point qu’il m’a souvent été difficile de savoir qui était le frère, le cousin, le voisin tant tout le monde semble soudé.
En immersion chez l’habitant :
aller à l’école avec les enfants
Il y a deux écoles dans le village, et Sarjani dirige l’une des deux. C’est donc tout naturellement qu’elle a voulu envoyer Petite Oreille à l’école, et nous n’étions pas contre, bien au contraire !
Notes de voyage – Jeudi 26 septembre 2019
Lebok nous a prêté un vieil uniforme à elle, un peu abîmé. Jupe rouge, chemise blanche. J’ai recousu l’écusson de l’école, le drapeau indonésien et la poche, ainsi que les passants de la ceinture. Il n’est pas tout à fait « comme neuf », mais ça ira !
Petite Oreille est contente d’aller à l’école. Nous partons de la maison avec les enfants de la famille.
Petite Oreille est toute fière. Beaucoup d’enfants se massent autour d’elle, curieux de voir cette petite touriste dans leur école. Lebok leur explique, tout sourire, que nous sommes hébergées dans sa famille. Elle aussi semble fière.
Petite Oreille ira avec les élèves de 1ère année, c’est l’âge où on commence l’école. Tous les élèves, sauf sa classe, s’alignent face au drapeau pour une prière avant d’aller dans leurs salles de classe respectives. C’est à ce moment qu’arrive l’institutrice de maternelle, tranquillement.
La classe commence par une prière. Tous les enfants, debout. Ils révisent ensuite l’alphabet face à un poster, et enchaînent par des lignes d’écriture sur les lettres V, W, X, Y, Z. Chacun doit montrer son cahier à la maîtresse qui met alors une note sur 100. Petite Oreille écope d’un 90, pour avoir bâclé la fin de chaque ligne (ce que je ne vais pas lui reprocher...).
Notes de voyage – Jeudi 26 septembre 2019
Tous les écoliers portent l’uniforme. Celui-ci est amené à changer au fil de la semaine, selon les activités pratiquées par les enfants. Les élèves de la classe de maternelle ont un uniforme qui tranche par rapport aux autres écoliers : jaune et vert. On les repère tout de suite ! Seuls deux élèves n’ont pas le même uniforme dans la classe. Un garçon, qui porte sans doute des vêtements d’un autre enfant de la fratrie, et Petite Oreille, qui fait avec ce qu’on nous a prêté.
Comme le peuple toraja est majoritairement chrétien, aucun élève, et aucune institutrice, n’a à se couvrir la tête. (Dans d’autres régions d’Indonésie, à majorité musulmane, les uniformes comportent des voiles et des casquettes.)
La récréation arrive très vite, dès que tous les petits élèves ont fini leurs lignes. Les enfants se précipitent vers l’extérieur. Certains courent derrière une poule, d’autres jouent sur un vieux toboggan rouillé. L’école n’est pas fermée, alors nombreux sont les élèves, toutes classes confondues, à descendre acheter des friandises et des chips à la boutique d’en bas. Cela semble tout à fait normal, et il y a fort à parier que le chiffre d’affaires du commerce repose quasi-intégralement sur les achats des écoliers.
Pendant ce temps, la maîtresse surveille vaguement les élèves. Elle semble s’ennuyer et scrute son smartphone.
Je regrette de ne pas avoir regardé l’heure, la récréation me paraît incroyablement longue.
Retour en classe. Prière. Tout le monde s’assoit, range ses affaires... et se lève à tour de rôle pour saluer la maîtresse, c’est fini !
Ça ressemble plus à de la garderie qu’à de l’école... Mais les classes des niveaux plus élevés semblent bien plus studieuses ! Après tout, les camarades de Petite Oreille n’ont que 5 ans, et ne vont à l’école que depuis quelques semaines.
Nous reprenons le chemin de la maison avec Lebok, Putri et la petite voisine (qui est restée muette quand j’ai essayé de lui demander son nom).
Nous marchons sur une petite route goudronnée au milieu des rizières. Les enfants vont tous à l’école à pied, sans les parents. Mais ils sont en réalité rarement seuls : tous ont un frère, une sœur, un voisin qui suit le même chemin qu’eux. Et sur la route, c’est un cortège d’écoliers qui défilent à heures fixes.
Les cérémonies funéraires au Pays Toraja
Le Pays Toraja est connu pour sa culture ancestrale toujours présente et vivante, même lorsqu’il s’agit de funérailles. Surtout lorsqu’il s’agit de funérailles. Le passage vers le monde des morts est capital chez les Torajas !
Le christianisme a été imposé lorsque l’Indonésie est devenue une colonie néerlandaise. Il s’est alors mêlé avec la religion ancienne, aluk todolo : la voie des anciens. Aujourd’hui, le Pays Toraja reste majoriatirement chrétien mais tout le monde continue de suivre les coutumes et cérémonies de l’aluk todolo.
On pourrait être tenté de qualifier cela d’animisme, mais ce serait réducteur : il s’agit bel et bien d’une religion à part, avec toute la complexité que cela suppose.
Les cérémonies funéraires sont donc au cœur de la culture Toraja. Ces rites durent plusieurs jours, avec des centaines d’invités. Certaines familles s’endettent sur plusieurs années pour garantir de belles funérailles à leurs défunts : la garantie d’une place au paradis.
Chez les torajas, le passage vers le monde des morts se fait dans le sang. Ce sont les animaux sacrifiés qui accompagnent l’âme du défunt vers l’au-delà.
De l’importance des buffles pour les Torajas
Pour savoir si quelqu’un est riche, ici, il faut regarder combien de buffles il possède. Le buffle sert à entretenir les rizières, bien sûr, mais c’est aussi l’animal qui va le mieux porter l’âme du défunt. Un buffle vaut donc beaucoup d’argent (parfois plusieurs dizaines de milliers d’euros), et on en prend soin. Enfin, soin jusqu’au moment où il sera égorgé, bien sûr.
Les représentations de buffles sont courantes dans la décoration toraja, mais le plus impressionnant reste les collections de cornes affichées sur les piliers des tongkonans. Elles sont les souvenirs des animaux sacrifiés par le clan. C’est aussi la preuve de la puissance, et de la richesse, de celui-ci.
Invitées à des funérailles torajas
Notes de voyage – mercredi 25 septembre 2019
Sarjani me passe un sarong noir, assorti à une écharpe, noire elle aussi, ainsi qu’un collier. Quant à Petite Oreille, elle remet le costume traditionnel déjà porté pour le mariage, orange vif.
Accompagnées de Suleman, nous rejoignons un village voisin, en voiture. La foule arrive. Des hommes se fraient un chemin, transportant des cochons attachés à des bambous par les pattes. Partout, des vendeurs ambulants proposent cigarettes et snacks. C’est la cérémonie funéraire de la tante de Sarjani, quelqu’un d’important.
La décoration de la maison est impressionnante, encore plus soignée que celle du mariage. Des terrasses aménagées sous les greniers à riz, des bâtiments montés spécialement pour la cérémonie, des tissus décorés aux symboles traditionnels...
Au centre, des hommes chantent, en cercle, autour de morceaux de viande déjà découpés. Ils se tiennent par l’auriculaire, se balancent au rythme, lent, du chant. Tous en noir, tous avec un couvre-chef. C’est un chant lancinant, obsédant, entre méditation et transe. À côté, un piquet cerné de sang est orné des cornes de buffles. Le sacrifice a déjà eu lieu.
Notes de voyage – mercredi 25 septembre 2019
Le corps, embaumé, est placé sur une espèce de catafalque, en hauteur, à la vue de tous. En dessous, un jeune homme habillé de blanc a les yeux fermés. Lorsque les chants cessent, il prend le micro, le place contre son menton, et d’un air concentré se lance dans des tirades que je ne comprends pas. Le phrasé est rapide, haché, sans intonation, mais plein de conviction. J’y devine une forme de prière, une façon d’accompagner les âmes.
Le catafalque est décoré avec les ornements traditionnels, ainsi que des panneaux en polystyrène recouvert de papier crépon. Selamat Jalan Nenek. Bon voyage grand-mère.
En Indonésie, le mot nenek (prononcez néné) est utilisé pour s’adresser à toute dame âgée, qu’elle soit de la famille ou non. C’est une marque de respect. Quant au « bon voyage », c’est bien de cela qu’il s’agit ici. Après avoir été malade pendant plus d’un an, enroulée dans son épais linceul, c’est aujourd’hui que Nenek s’en va. C’est aujourd’hui que l’on pleure.
Ce délai entre le moment où le cœur cesse de battre et la cérémonie funéraire permet à la famille de commencer le deuil, de s’habituer à l’absence. On continue de parler à la personne, on lui apporte à manger, on vient lui tenir compagnie. Le départ est plus doux. Selon les familles, cela peut durer plusieurs années comme cela, mais c’est généralement autour d’un an. C’est aussi le temps qu’il faut pour réunir l’argent. Car ces cérémonies coûtent des fortunes.
Notes de voyage – mercredi 25 septembre 2019
La famille sort de la maison, guidée par des enfants, dont Petite Oreille, et deux femmes en costume orange traditionnel. Les hommes montent par un côté de l’escalier, les femmes par l’autre. Ils font le tour de la ronde d’hommes, passe devant la dépouille de la défunte, puis reviennent s’asseoir quelques minutes plus tard. Certaines femmes pleurent. Tout le monde prend un air très grave, qui tranche avec l’attitude du reste des invités.
Des femmes en robe violette font des aller-retours avec du café pour la famille. Beaucoup de café.
Ce cérémonial se répète plusieurs fois. La famille sort, fait le tour des hommes qui chantent autour de animaux sacrifiés, passe près de la grand-mère, puis retourne s’asseoir. Et les femmes en violet apportent du café.
Plusieurs fois, la famille est accompagnée par un groupe de musiciens en costume qui jouent du gamelan. (C’est l’instrument traditionnel d’Indonésie par excellence).
Notes de voyage – mercredi 25 septembre 2019
Un homme hurle dans un micro, en pointant les cochons avec un bâton. Les animaux sont déposés par terre, attachés par les pattes. Ils ont été offerts par certains des invités. L’homme au micro cite Suleman, qui fait un signe de la tête. Je lui demande si c’est son cochon. Il acquiesce. Certains des cochons sont accrochés à des planches. Un jeune garçon s’approche. Je sais que ce qu’il va se passer ne va pas me plaire.
Je cherche ma fille des yeux. Elle est toujours avec la jeune femme en orange, celle qui escorte les invités. Ce n’est certainement pas sa première cérémonie, elle aussi sait ce qu’il va se passer. Elle entraîne Petite Oreille vers les cuisines. C’est mieux ainsi.
Le jeune bourreau plante une longue lame derrière la patte avant du cochon. Il vise le cœur. Le cri du cochon me glace le sang. Plusieurs autres cochons y passent ainsi. Tous hurlent. Je détourne le regard, et c’est à cet instant que je remarque qu’il y a très peu d’enfants présents. Beaucoup moins qu’au mariage. La cérémonie est bien plus longue, et bien moins drôle...
Plus tard, Suleman m’expliquera que le garçon s’y prenait vraiment mal, que les cochons n’auraient pas dû souffrir ainsi.
Notes de voyage – mercredi 25 septembre 2019
Ce qui semble être un homme d’église hurle dans le micro. Pendant longtemps. Tout le monde est très sérieux, l’air grave. Le sermon semble accusateur.
L’homme qui pointait les cochons revient. Tandis que la famille continue ses allers-retours sous les gamelans, il hurle à nouveau, mais ce coup-ci, au milieu des morceaux de viande. Il doit s’agir des buffles sacrifiés avant notre arrivée. Il attrape chaque morceau, crie, puis le donne à quelqu’un.
On m’expliquera plus tard que ces cérémonies sont l’occasion pour les gens les plus riches, de redistribuer une partie de ce qu’ils ont. « Il faut savoir redonner », m’a-t-on dit. Car, si les sacrifices d’animaux peuvent paraître étranges vu de chez nous, il faut savoir que chaque animal sera intégralement découpé et distribué pour être mangé. Chaque famille présente repartira avec son morceau de viande.
Lorsque nous sommes partis, la cérémonie continuait encore. Et elle devait se poursuivre le lendemain, car après les sacrifices, il reste encore à emmener le corps dans le tombeau.
À cet instant, vous vous dites qu’un cadavre, ça a une odeur. Et que, même enroulé dans beaucoup de tissu, ça doit sentir.
Pourtant, je peux vous affirmer que je n’ai senti aucune odeur, ni à la cérémonie, ni dans le tongkonan avec la mère de Sarjani, ni même dans les tombeaux.
Dans la culture Toraja, il y a 3 castes, et en plus, il y a les gens « spéciaux » : les chamans, les coupeurs de pluie... Ces gens un peu mystiques sont à part dans la société. On ne leur pose pas trop de questions.
Alors, bien sûr, il y a sans doute des explications scientifiques. Autrefois, ils utilisaient probablement les propriétés de certains végétaux, et aujourd’hui du formol. Mais je trouve la version officielle, celle qui est magique, beaucoup plus poétique. Ainsi, il existe des coupeurs d’odeur. Là où le coupeur de pluie va définir une zone où il ne devra pas pleuvoir, le coupeur d’odeur va, lui, prendre l’odeur, et la mettre ailleurs. Comment ? Eh bien, en utilisant un fil, tout simplement. Le fil ira de la personne embaumée jusqu’à la forêt, pour conduire les odeurs là où elles ne dérangent personne. Et ainsi, toute la maisonnée pourra continuer sa vie avec une personne « malade » dans la pièce, comme si de rien n’était.
Les tombeaux torajas
Vous vous souvenez quand, plus haut, je vous expliquais que le Pays Toraja était couvert de rochers ? Eh bien, ceux-ci ont façonné non seulement les paysages mais aussi la culture locale : ils servent de caveau. Des emplacements sont creusés dans la roche pour accueillir les défunts, placés dans des cercueils finement sculptés. Parfois,ce sont aussi des grottes qui sont utilisées, comme c’est le cas dans les villages de Kete Kesu et Londa, devenus très touristiques (pendant deux semaines au Pays Toraja, nous n’avons croisé aucun touriste... sauf le jour où ma fille et moi-même sommes allées faire le tour des sites connus !).
Les corps seront ensuite exhumés plusieurs fois, au cours des décennies suivant la cérémonie. Si jamais il n’y a pas eu assez de buffles sacrifiés la première fois, ce sera l’occasion de demander à d’autres animaux de porter l’âme vers le paradis. La famille, pendant l’exhumation, changera les vêtements du défunt, lui parlera, et puis, quand il ne restera plus que le squelette, déposera les ossements ailleurs pour libérer la place.
Ainsi, les grottes de Londa, l’un des plus gros caveaux du Pays Toraja, sont non seulement remplies de centaines de cercueils, parfois entassés les uns sur les autres, mais aussi de crânes non identifiés, empilés. À côté, des cigarettes sont déposées, en offrandes.
Le rapport à la mort est surprenant. De la même manière que nous étions les bienvenues à l’enterrement, il n’y a ici aucun problème à visiter le caveau, devenu lieu touristique. Pire, le membre de la famille qui nous guide dans les grottes nous encourage à prendre des photos, parfois un peu scabreuses à mon goût : faire un selfie en posant son visage à côté d’un crâne, par exemple...
Les membres les plus éminents du clan se trouvent dans les emplacements les plus en hauteur. Les castes les moins favorisées optent pour l’enterrement au cimetière, tout comme de plus en plus de citadins, pour l’aspect nettement plus pratique de la chose.
Les bébés décédés sont, quant à eux, placés dans des arbres, afin de continuer leur croissance. Il y a plusieurs arbres qui abritent ainsi des dépouilles de jeunes enfants, mais fort heureusement, ils restent rares.
Une coutume qui se pratique de moins en moins est l’installation d’un tau-tau devant la sépulture : une sculpture, généralement en bois, à l’effigie des défunts, qui peuvent ainsi continuer à regarder ce qui se passe sur terre...
Le Pays Toraja chez l’habitant :
dans la famille de Ma Anjani
La seconde moitié de notre séjour dans les montagnes Toraja se déroule dans une autre famille, celle de Ma Anjani. Anjani est en fait le prénom de la fille aînée de notre hôte, mais comme le veut l’habitude locale, on adopte un nouveau nom en devenant parent. Je suis donc Ma Petite Oreille, et notre hôte, Ma Anjani, mère de 5 enfants : Anjani (que nous ne croiserons que rapidement car elle fait ses études en ville), Jesika, Asep, Aryari, Milka et Rero. Elle vit sur les hauteurs, assez loin du village, avec sa mère, sa sœur, leurs enfants respectifs, et, de temps en temps, son mari, qui travaille beaucoup à l’extérieur.
Les deux sœurs vivent dans des maisons distinctes, en face l’une de l’autre, sur le même terrain. Les enfants vont et viennent (à ce moment de l’article, vous avez retenu, en principe, que les enfants indonésiens sont très libres !). Il y a un petit potager, des poulets, des cochons, des plantations de café, de nombreux arbres... L’eau arrive directement de la montagne par un tuyau. À la saison des pluies, un second tuyau permet même de remplir une petite piscine, construite pour amuser les enfants !
Chez Ma Anjani, on dit le bénédicité avant le repas et on va au catéchisme. On a donc suivi les enfants à leur cours. Les filles avaient mis de jolies robes, et on a marché jusqu’à l’église. Ou plutôt jusqu’au temple, puisqu’ils sont protestants. Un groupe de jeunes hommes et femmes, en uniforme, dispensait le cours. Un peu de discours, beaucoup de chansons, et un poil de lecture. De nombreux enfants restaient jouer dehors, certains faisaient des aller-retours. On aura vu plus strict !
Une journée dans les rizières
Un soir, Ma Anjani nous a proposé d’aller travailler dans les rizières le lendemain. Elle le disait sur un ton mêlant plaisanterie et défi. Et forcément j’ai dit oui. C’est ainsi que, le lendemain, elle a relooké Petite Oreille en travailleuse, et nous a conduites aux champs. C’est une tâche salissante, on met donc des vêtements qui ne craignent rien. Et comme on sera en plein soleil, même avec l’air frais des montagnes, on protège sa tête.
Un groupe de femmes s’affairait déjà à repiquer le riz. Elles étaient probablement arrivées de bonne heure, bien avant nous. Les plaisanteries ont fusé immédiatement. La patronne était dans les champs, et en plus elle ramenait une petite ouvrière. Cela avait de quoi amuser les employées de Ma Anjani. Elle même semblait d’ailleurs très amusée par la situation !

Nos collègues des rizières ! (Devant elles, ce ne sont pas des déchets destinés à rester là, mais les papiers utilisés pour les repas de midi)
Le travail du jour consistait à prendre des jeunes pousses, cultivées dans un petit carré, très serrées, et à les repiquer, plus espacées, dans la boue des rizières, avant l’irrigation. Je m’attendais à ce que ce travail ne soit pas très agréable : il faut être penché toute la journée, bonjour les maux de dos. Mais il y a un détail auquel je n’avais pas pensé : on ne voit pas où on met les pieds. Et le fond de la rizière est jonché de cailloux.
On a bien essayé de garder nos sandales au début, mais la boue restait coincée dedans, rendant impossible tout mouvement. Je vous laisse imaginer l’éclat de rire général quand mon pied est ressorti sans chaussure, et que j’ai dû plonger le bras pour aller la chercher... Il a fallu se résoudre à y aller pieds nus, et... ouille, aïe, ouille !
Avant de repartir à la maison, Ma Anjani s’est avancée dans une autre rizière, dans laquelle il n’y avait que de la boue. Elle a plongé les mains dans le fond et, à l’aveugle, elle a ratissé la boue pour en sortir des dizaines de petits escargots.
Le temps que nous nous lavions et mettions des vêtements propres, les escargots étaient déjà bouillis. Les enfants se sont alors tous affairés autour du saladier. Il fallait, à l’aide d’un petit pic, réussir à sortir chaque animal de sa coquille. Les petits cuisiniers avaient pour mission de disposer les escargots dans une assiette. Mais un certain nombre de gastéropodes sont allés directement dans les estomacs des enfants, qui semblaient tous se régaler...
Ma Anjani cultive plein de choses autour de la maison, et les enfants participent aux récoltes. Contrairement au riz, ces plantations sont destinées à la consommation de la famille, qui vit ainsi en quasi-autonomie. Elles nous a ainsi emmenées ramasser des tubercules, mais aussi du café, sur les nombreux arbres qui poussent derrière la maison.
Petite Oreille, Jesika et Milka ont rempli un plein panier de petits grains rouges, de quoi les occuper une bonne heure !
Ma Anjani s’occupe de quasiment tout dans la maison, à l’exception d’une chose : le ballo. La récolte du « vin de palme » est laissée à son mari (et c’est d’ailleurs le seul moment où je l’ai vu !).
La boisson, spécialité locale, se récolte en faisant une entaille dans un palmier, et en laissant la sève s’écouler dans un tube en bambou (à la manière de la sève de pin, ou du caoutchouc). La récolte n’est pas aisée : il faut grimper sur des échelles en bambou, à la nuit tombée. Pourquoi à la nuit tombée me demanderez-vous ? Eh bien, je ne sais pas ! J’ai deux hypothèses. Soit c’est ce qui convient le mieux à Pa Anjani qui rentre toujours tard du travail. Soit c’est parce que le palmier produit la sève uniquement dans la journée.
En trinquant avec moi, Ma Anjani m’explique que le ballo s’alcoolise en fermentant. Le premier jour, la boisson est assez douce, mais plus on attend, plus elle se charge en alcool. Elle la boit donc plutôt fraîche, et je dois avouer que c’était, certes surprenant au premier abord, mais néanmoins très bon !
En famille chez l’habitant
S’il y a une chose dont je ne me lasse pas en hébergement chez l’habitant, c’est de regarder ma fille jouer avec les autres enfants comme si elle faisait partie de la famille. Ils ont dessiné, fait des origamis, joué à la balle, fait du vélo, chanté et surtout beaucoup ri.
Petit intermède 100% photo avec Jesika, Milka, Asep, Aryari, Rero, et bébé Saron, la cousine...
À Dende avec Pak Simon
Tout commence à Batutumonga. Dinny et son mari ont ouvert un lieu qui permet aux enfants du village de venir prendre des cours d’anglais et de musique traditionnelle. Les profs y sont tous bénévoles, et font tous partie de l’association de promotion du tourisme local.
Les enfants de Ma Anjani assistent toutes les semaines aux cours, et c’est en les suivant que nous rencontrons Pak Simon, prononcez Saïmone. Pak est la formule de politesse pour un homme de son âge : l’équivalent de « tonton », la notion de respect en plus.
Pak Simon a une fille de 10 ans, Kalpa, qui s’entend tout de suite très bien avec Petite Oreille. On assiste donc au cours d’anglais, consacré ce jour-là au vocabulaire de la famille. L’occasion pour moi d’apprendre les mots en indonésien ! Les enfants sont très studieux, s’essaient à de petits dialogues, et je me retrouve mise à contribution comme cobaye afin qu’ils s’entraînent sur moi en me posant des questions...
La cérémonie du riz
Et c’est ainsi que, de fil en aiguille, nous nous retrouvons invitées dans la famille de Ma Kalpa, pour assister à la cérémonie du riz. Départ le lendemain ! (en réalité, ça ne s’appelle pas cérémonie du riz, mais je ne sais pas comment le traduire autrement !)
Dende est un petit village à 2h de route de Batutumonga, loin des itinéraires touristiques. Nous partons en scooter et sillonnons des paysages magnifiques sur des routes escarpées. Les derniers mètres s’effectuent à pied, sur des chemins pentus. À partir de là, il n’y a plus de route, et même les deux roues ne passent pas !
Batutumonga était une grande vallée, Dende est une série de collines. Les paysages sont différents, mais non moins superbes. On retrouve les tongkonans, bien sûr, les rochers et les rizières en terrasses.
Nous sommes accueillies en grande pompe par toute la famille de Ma Kalpa, et notamment la Nenek. Je comprends que nous sommes les premières étrangères à venir passer une nuit ici, et que ça suscite toutes les curiosités. Aussi, l’une des premières choses à faire est d’aller visiter tout le village, pour nous présenter. L’occasion pour la famille de dire à tout le monde « eh regardez qui dort chez nous ce soir » !
Petite Oreille et Kalpa sont inséparables, et ont une nouvelle venue dans leur bande : Nenek. L’arrière arrière grand-mère a le regard qui pétille et l’envie de blaguer. Elle monte les côtes en courant, fait le pitre, joue à la marelle, plaisante tout le temps. On me dit qu’elle approche les cent ans. Personne ne sait quel âge elle a exactement, mais c’est la doyenne, qui suscite le respect et l’admiration de tous. Elle nous mène chez chacun des membres de la famille, dans une longue randonnée au milieu des rizières.



À cet instant, il va se passer un truc que l’on qualifiera de cocasse.
Nous nous sommes arrêtés chez l’un des nombreux membres de la famille. Les tongkonans dominent les rizières. La lumière est rasante, dorée, magique. Je décide de sortir le drone pour quelques images aériennes.
Je m’éloigne pour le faire décoller et, rapidement, je me retrouve cernée d’enfants qui regardent mon écran. Normal. Ils sont curieux, c’est pareil partout dans le monde.
J’essaie de rester concentrée pour faire un beau mouvement. Traveling arrière depuis les tongkonans. Le drone survole les rizières. Et là, vous avez sans doute pressenti la suite : il se prend un arbre. J’assiste à la chute en caméra subjective depuis mon écran de retour. Et puis c’est le noir.
Les enfants me regardent, interloqués. Je montre du doigt : pohon. L’arbre. Je ne sais pas faire une phrase correcte, mais les gamins comprennent vite. Je m’élance alors vers le petit bois où le drone est tombé, suivie par une cohorte d’enfants.
Et je cherche. Et ils m’aident. En vain. C’est escarpé, avec une végétation dense. C’est le corps couvert d’égratignures que j’abandonne : il faut rentrer avant la nuit. J’explique à Pak Simon que je reviendrai le lendemain.
Sauf que le lendemain, Pak Simon refuse que j’y aille : il part seul avec son beau-frère, me disant de rester à la maison avec Petite Oreille. J’ai eu beau lui expliquer que la perte du drone était entièrement ma faute, Pak Simon culpabilise. Je lui ai bien dit que ça n’était pas grave, que l’important c’était que personne ne soit blessé, et que si je voulais le récupérer c’était uniquement pour la carte mémoire et pour éviter la pollution de la batterie... Mais il est resté tout gêné.
Et une heure plus tard, il est revenu, victorieux, le drone dans les main. L’engin était bien sûr complètement cassé, mais Pak Simon l’avait retrouvé !
Petite Oreille a droit à toutes les attentions de la Nenek. Il faut que je vous dise que ma fille a une passion pour les animaux. Tous les animaux. Et en Indonésie, il y en a partout, des animaux. À Dende, elle a ainsi beaucoup joué avec les gallinacés. Nenek attrapait un poussin, le tendait à Petite Oreille qui le caressait délicatement, sous le regard attendri de la vieille dame.
Ce matin-là, Petite Oreille avait jeté son dévolu sur le coq. Un très beau coq, haut sur pattes comme le sont les coq d’Indonésie. Elle tendait la main vers lui. Il la regardait, avec méfiance et curiosité.
Nenek s’est approchée. Elle a caressé les cheveux de Petite Oreille en souriant. Puis s’est avancé vers le coq. Elle a posé son sac à main par terre. Elle a toujours ce sac en tissu avec elle. Comme une Mary Popins Toraja, son sac est rempli de mille trésors. Des noix de bétel, pour chiquer, bien sûr. Des huiles, minyak gosok, c’est bon pour tout. Une gourde.
Nenek fouille dans son sac en adressant un large sourire et un clin d’œil à Petite Oreille. Elle marmonne, toujours souriante. Elle ne dit rien, elle fait juste semblant de parler. Le coq s’approche, curieux. Y’aurait-il à manger dans le sac ? Elle continue ne marmonner, remuant les affaires dans son sac. Le coq avance encore un peu, tendant le cou pour mieux voir... Et hop, elle l’attrape !
Le coq ne se débat pas, il a l’habitude et sait qu’il ne lui arrivera rien.
Le frère de Ma Kalpa prépare un barbecue. La cérémonie aura lieu dans l’église qui jouxte la maison, et sera suivie d’un bon repas. Il faut donc couper les bambous, et préparer le feu pour tout faire cuire.
Pendant que la maisonnée s’active à la préparation de la fête, Pak Simon et Ma Kalpa nous emmènent pour une nouvelle petite randonnée dans les rizières. Kalpa et sa tante sont en pyjama, cela semble normal. Nous marchons sur les petits chemin de terre qui bordent les rizières en terrasse, prenant garde à ne pas glisser. Les paysages sont superbes.
Nous marchons ainsi jusque chez la maman de Ma Kalpa. Elle vit dans un autre tongkonan, avec sa mère, une de ses filles, et sa petite fille. De nombreuses affichettes à l’effigie de Jesus et Marie sont punaisées au mur.
Notez que, si vous avez du mal à suivre l’arbre généalogique, c’est normal. Et tout le monde qui s’appelle Ma Quelque chose, Caca (sœur, pour toutes les femmes du même âge...) ou Nenek n’arrange absolument rien ! J’ai dû reposer la question plusieurs fois pour établir les liens, et je ne suis pas à 100% sûre qu’ils sont corrects...
Nous restons quelques instants dans la maison pour manger et boire un café (à cet instant du voyage, je me retrouve à en boire plusieurs par jour, ça me donne moins envie de vomir qu’au début...) puis reprenons la route tous ensemble pour la cérémonie.
Pak Simon nous conduit jusqu’à l’église. C’est un petit bâtiment, très simple. Quelques bancs, une estrade. Tout le monde se déchausse avant de rentrer. L’église est pleine à craquer. Petite Oreille et Kalpa reste jouer dehors tandis que quelques vieilles personnes se tassent pour me laisser une place, avec un grand sourire. Impossible de décliner l’offre dans ces conditions, je vais devoir assister à l’office !
Il s’agit de bénir les futures récoltes, à ce que je comprends. Les plantations n’ont pas encore commencées, et tout le monde se réunit pour espérer que la prochaine soit bonne. Une fois encore, la religion chrétienne s’est accoutumée des traditions et coutumes toraja.
La fin de la messe signe le début du repas. Les alentours de l’église sont devenus une grande aire de pique-nique ! Nous, nous mangerons sur l’estrade qui se trouve sous le tongkonan, avec tous les enfants et les femmes de la famille. Le repas est servi dans des grandes feuilles de papier qu’il faut préalablement plier pour former un réceptacle. On nous sert généreusement (comme d’habitude !) en riz, en viande... Makan, makan, mangez, mangez ! Lagi, lagi, encore ! Comment je leur explique que j’ai eu un petit déjeuner en me lever, un second petit déjeuner quand ma fille s’est levée, un troisième quand nous sommes allées chez la maman, et que là mon ventre va exploser ?
Voilà qui résume bien l’accueil au Pays Toraja !
Mes conseils pour visiter le Pays Toraja
Sulawesi n’est pas l’île la plus touristique d’Indonésie, loin de là (Bali concentre une grosse partie du tourisme, bien sûr !). Pour autant, une bonne partie des touristes qui se rendent à Sulawesi inclut le Pays Toraja dans leur itinéraire (et ils ont bien raison). La région n’est donc pas « en dehors des sentiers battus », comme on pourrait le croire. Mais ça ne veut pas dire qu’on va y croiser des foules puisqu’au final, les touristes se concentrent sur les lieux... touristiques. Et, à mon sens, c’est loin d’être les plus intéressants !
Ainsi, les tongkonans de Kete Kesu, village proposé dans la totalité des circuits organisés, sont certes très beaux, mais ils sont inhabités. Et la totalité de la ville est dédiée à des magasins de souvenirs... Vous verrez en réalité des tongkonans et des tombeaux dans la pierre partout, nul besoin d’aller sur les sites touristiques pour ça !
Si vous voulez réellement découvrir la vie locale du Pays Toraja, je vous conseille donc vivement de procéder comme nous : allonger votre séjour de quelques nuits, dormez chez l’habitant, et louez éventuellement un scooter pour rayonner !
Bonnes adresses et contacts
Les personnes citées dans cet article sont toutes membres du comité de promotion touristique local (Pak Simon, Ma Anjani, Sarjani, Dinny). Ce sont des gens qui ont à cœur de faire découvrir leur culture et leur région.
Pour l’organisation en amont de votre séjour, voici deux contacts directs, auxquels vous pouvez écrire en anglais.
Mail : dinny (a) torajamelo.com
Whatsapp : +62 811−8881−556
Dinny est parfaitement bilingue en anglais, et pourra vous aider à organiser votre séjour. Elle connaît tout le monde !
Whatsapp : +62 852−4222−8774
Simon est guide. Il peut donc vous aider à trouver les hébergements chez l’habitant, mais aussi vous emmener en rando !
Faire de l’hébergement chez l’habitant
Je vous le conseille vivement !
Alors, oui, ce sera rudimentaire (mais jamais sale). Pour l’eau chaude, il faudra d’abord passer attraper la bouilloire à la cuisine, et il est peu probable qu’il y ait du papier toilette (ici, on se lave au lieu de simplement s’essuyer). Mais vous découvrirez la vie quotidienne des villages torajas !
Je vous encourage donc à contacter Dinny ou Simon, dont les contacts sont ci-dessus, afin qu’ils vous mettent en contact avec Sarjani (pour dormir dans le tongkonan !) ou Ma Anjani !
Comment se déplacer
Une voiture vous encombrera, ici. D’ailleurs, très peu de personnes en ont, préférant marcher et faire appel à des chauffeurs au besoin.
L’idéal est donc d’explorer les rizières à pied, et d’éventuellement louer un scooter lorsque vous voulez aller plus loin.
Pour louer un scooter, c’est assez simple : il suffit de demander la veille à vos hôtes. Ils connaissent forcément quelqu’un qui en a un et a envie de gagner quelques sous. Le notre nous a coûté 6€ pour la journée...
La conduite est très agréable car il y a très peu de circulation, et le peu de voitures et camionnettes qu’on croise roule très doucement.
Où aller ? Quoi visiter ?
Kete kesu et Londa méritent le coup d’œil, bien sûr, mais je vais ici me concentrer sur des sites moins connus du Pays Toraja.
L’ascension du Mont Sesean
Pak Simon nous a proposé de gravir le Mont Sesean, au petit matin. Petite Oreille était particulièrement motivée, nous avons accepté l’invitation. La montée se fait en environ 2h. C’est sportif, mais rien d’insurmontable pour quelqu’un en bonne condition physique. Petite Oreille venait juste d’avoir 5 ans, et elle n’a eu aucune difficulté à tout faire !
D’en haut, on domine une partie du Pays Toraja avec une vue plongeante à 360° !
Note : attention, faîtes-le en semaine, car les jeunes indonésiens envahissent le sommet les soirs de week-end !
La forêt de bambou
Les bambous poussent vite. Très vite. L’espèce présente au Pays Toraja peut atteindre 5 ou 6 mètres en un an.
À Landorundun, le comité de tourisme local a aménagé une promenade dans la forêt où se tient, de manière régulière, un marché d’artisans locaux. Je n’ai pas pu y assister car il ne tombait pas au bon moment, mais la promenade dans la forêt valait à elle seule le coup d’œil !
Rencontrer les artisanes tisseuses
La société toraja est plutôt égalitaire. Les femmes héritent d’une part du patrimoine de la famille, au même titre que leurs frères. Elles sont actives, ne se mettent pas en retrait. Certaines tâches restent codifiées selon les genres, mais personne ne se tourne les pouces.
Pour autant, cela d’empêche pas qu’il puisse y avoir des violences commises à l’égard des femmes. Dinny, qui est très engagée sur cette question, a créé Toraja Melo, une marque de textile, avec sa sœur (designer). Les tissus s’inspirent de la tradition toraja, des motifs et couleurs. Les tissages sont réalisés par des femmes qui ont toutes une histoire difficile. Un mari violent, un conjoint qui disparaît après la naissance de l’enfant... Ces femmes ont donc été formées au tissage afin d’obtenir un moyen de subsistance et une autonomie financière. Dinny leur fournit leur matériel et un salaire en fonction des pièces réalisées chaque mois. Elles travaillent ainsi toutes de chez elles.
Aucun tour touristique n’est organisé pour visiter les tisseuses, mais leur rendre visite avec Dinny est très intéressant pour réaliser le travail que demande chaque pièce !
Explorer le Pays Toraja à pied et en scooter
Profitez des paysages et des rencontres inopinées, choisissez un chemin au hasard et perdez-vous, c’est le meilleur moyen d’avoir de bonnes surprises !
Ce voyage au Pays Toraja a été réalisé avec le soutien de l’Office de Tourisme d’Indonésie, Toraja Melo, Lembaga Desa Wisata Suloara ainsi que Singapore Airlines.
7 commentaires
Vous m’avez fait voyager rien qu’avec vos photos. Votre histoire donne envie d’aller à l’aventure. Merci pour ce partage
Superbes photos et des textes qui les illustrent parfaitement... A force de sous-traiter (cf : les photos au jetable), petite oreille va finir par vous voler la vedette ! Attention...
Superbe reportage ! J’ai une question sur le comportement de votre fille. Se dispute-t-elle avec les autres enfants ? fait-elle des « bêtises » dans les logements ? comment gérez-vous ces incidents s’ils arrivent ? Mon fils est assez turbulent, je me demande comment ça se passerait.
Merci 🙂
Jusqu’à présent, je n’ai pas le souvenir d’avoir dû gérer des incidents. Généralement, elle joue bien avec les autres enfants et suit le mouvement !
Je pense qu’en groupe, loin de l’univers quotidien, un enfant, même turbulent, peut s’adapter, et même surprendre ses parents !
Bonjour,
Je trouve vos photos magnifiques ! Un grand merci pour ce très beau témoignage qui va sûrement nous aider à organiser notre voyage. En effet, on a décidé de partir en Indonésie cet été avec nos deux filles de 5 et 9 ans. Et après des jours d’indécision, notre choix s’est finalement porté sur l’île de Sulawesi. Vos récits m’ont fait rêver. Je pense que l’on va utiliser vos contacts. Cependant, mon mari et moi avons un anglais très limité. Peut-être ferait-on mieux de chercher un guide francophone.
Que de souvenirs à chérir en ces temps de pandémie...
Magnifique ! J’adore l’idée de mélanger esquisses et photos ; ces dernières étant toujours aussi magnifiques ! Bravo