C’est tôt le dimanche matin que nous grimpons dans le Thalys. Le soir-même, nous dormirons à bord du plus gros navire au monde, un cargo plein de conteneurs : le Marco Polo de la CMA CGM. Mais avant, nous avons prévu quelques heures pour visiter Rotterdam, une ville portuaire des Pays-Bas dont nous ignorons tout.
Après le Projet Brel, nous voilà dans une ville chantée par Ferré. Il n’en restait plus qu’un, et c’était celui-là. Un port du Nord ça plaît, surtout quand on n’y est pas. Ça fait qu’on voudrait y être, ça fait qu’on ne sait pas bien s’il faut s’taper l’poète ou s’taper la putain... d’Rotterdam.
Rotterdam ne bénéficie pas vraiment d’une réputation reluisante : ville un peu sale, un peu mouillée, avec des marins en rut et des prostituées. Mais une fois sur place, rien de tout ça, finalement. Enfin, si : c’est mouillé, forcément. Mais aucune prostituée harcelée par des barbus tatoués. Au contraire, des familles, des fanfares qui reprennent des chants de Noël, et des retraités qui promènent leurs chiens. Et puis cette architecture hollandaise avec ses larges fenêtres et ses toits typiques.
Ceci n’est pas un exemple d’architecture typique
Avec ses vélos, ses canaux, ses jardins, ses maisons et leurs jardinets, la ville donne finalement l’image d’un lieu plutôt familial. Et en tant que cyclistes, on se prend à rêver que Paris ressemble un jour à Rotterdam : pistes cyclables partout (des vraies pistes, séparées de la route !), omniprésence de parkings à vélos, garages partout et bienveillance globale. On remarque aussi que (presque) tous les vélos sont de vieux biclous, les nuits dehors sous l’humidité ne doivent pas donner envie d’investir dans de belles bécanes.
Les rues sont un peu désertes, dimanche d’hiver oblige. Mais ça ne nous empêche pas de nous promener jusqu’au port pour observer un peu les bateaux.
A 17h, nous avons rendez-vous « devant le Starbucks de la gare centrale » avec un chauffeur de taxi privé. C’est lui qui doit nous conduire jusqu’au cargo, et heureusement qu’il est là pour nous introduire dans cet univers de paperasse. Jusque-là, nous ne connaissions que les petits bateaux sans permis que nous avions conduits sur les canaux de France et de Pologne. L’univers des cargos est bien loin de nos petites péniches de plaisance. On ne rentre pas dans un port de marchandises à pied. Et même en voiture, cela suppose quelques formalités administratives. Les raisons sont certainement entre la sécurité (il y a quand même des conteneurs qui volent au-dessus de nos têtes, portés par des grues gigantesques) et la protection des porte-conteneurs (notamment en terme de clandestinité de voyageurs).
Le chauffeur nous conduit d’abord au bureau de l’immigration. Nous partons par les voies maritimes, ce n’est plus l’espace Schengen ! Inspection des passeports et nous filons ensuite vers le port. Le chauffeur emprunte une autoroute pendant un long moment (plusieurs dizaines de minutes), et lorsque nous pénétrons dans le port, nous n’avons pas fait la moitié du trajet. Il fait nuit. Il y a des lumières sur toutes les grues, c’est à la fois beau et très étrange, on pourrait se croire dans un film de science-fiction.
Il nous faut encore passer le bureau de sécurité pour pénétrer au-delà des grilles. Le taxi roule au milieu des conteneurs. Nous sommes comme des gamins, à essayer d’apercevoir le bateau. C’est le plus grand au monde, on devrait le voir de loin ! Le port semble s’étirer sur des dizaines de kilomètres. Et soudain, la voilà : la proue monstrueuse sur laquelle s’affiche « CMA CGM MARCO POLO » ! En lettres blanches.
Photo prise quelques jours plus tard, dans le port du Havre, en quittant le navire
Le taxi nous laisse en bas d’un étroit mais long escalier. Nous inscrivons nos noms, et nous voilà partis pour notre premier voyage en cargo !
On découvre notre chambre, immense, à l’image des proportions du bateau, et nous passons la soirée le nez collé aux sabords, à regarder les grues qui s’affairent et les conteneurs qui s’empilent sur le cargo et passent à quelques mètres de nous.
La photo de notre chambre n’a, bien sûr, pas été prise cette nuit-là non plus, mais le lendemain matin.
20 commentaires
Ça donne envie ! C’est quoi leurs destinations les plus lointaines avec des passagers civiles ?
ouha super récits j’ai déjà envie de mettre mes botes et monter sur le ports. Comment avez vous fait pour avoir le droits de monter à bords ? J’ai toujours eu envie de monter quelques jours sur un cargo, mais je n’ai pas encore pris le temps de m’y atteler.
Encore merci pour ce recits
Retour du Monde : il y aura un article avec toutes les infos pratiques bientôt ! Mais celui-ci passe notamment par Malte et la Malaisie avant de rejoindre Shanghai.
Cyril : en fait, nous étions invités par CMA CGM, mais, dans tous les cargos, il y a des cabines passagers pour embarquer des voyageurs, sur des destinations plus ou moins lointaines. (si nous n’avions pas été invités, nous aurions choisi un tronçon plus « exotique » que Rotterdam-Le Havre ^^, même si ça reste intéressant à voir). Comme je le disais ci-dessus, je terminerai ce récit avec des infos pratiques 🙂 Si tu as des questions, profites-en !
A bord c’est plutôt ambiance la croisière s’amuse ou plutot vieux loup de mer ?
Vivement la suite. Et si mon budget ne le permet pas, même Rotterdam-le Havre serait déjà un début de rêve pour moi.
Une question pour le dernier billet de la série : c’est crédible à faire avec un bébé / une petite fille (d’ici à ce qu’on se lance, je suppose qu’elle ne sera plus un bébé).
C’est royal comme voyage blog !
Je croyais que les voyages en cargo c’était seulement pour les très longues distances, du coup Rotterdam-Le Havre est juste idéal !
Oh je rêve d’un long voyage en cargo ! Hâte de lire la suite !
Bonjour,
comment avez-vous acheté ce voyage sur un cargo ? ça m’intéresse.
Coucou !
J’ai hâte de lire l’article contenant les infos pratiques ! Habitant au Havre, je suis plutôt bien placée pour ce type de voyage !
Où se renseigner ? Compagnies maritimes ? etc... J’imagine les longues listes d’attente...
Vu que ce n’est plus l’espace Schengen, passeport obligatoire ?
Coût bien évidemment
Manger à bord ? On prend notre pique-nique ou on peut manger à la cantine avec les marins ? Voire à la table du capitaine ?
Fumer ? Un pont fumeur à disposition ?
Salle de cinéma ? pour les longs voyages...
Possibilité d’accès sur les ponts pour prendre l’air ?
Possibilité de visiter le cargo ?
Si tu as des durées de voyage (en heure/jour) ça m’intéresse aussi...
Merci d’avance pour tes réponses et ton futur article !
Je ne savais même pas qu’on pouvait disposer d’une telle chambre dans un cargo ! J’ai l’image un peu glauque des gens pauvres qui voyagent entassés dans les cargos.
Je lirai la seconde partie avec intérêt !
Ce ne sont souvent pas des gens pauvres… Le voyage en cargo coûte environ 100 € par jour, et un trajet transatlantique prends un dizaine de jours… Donc Le Havre-Montréal coute au moins 1000 € aller-simple. À ce prix-là, les gens pauvres qui le peuvent prendront l’avion. 😉
Ca fait quelques temps que je pense à faire un voyage de ce type. Je suis curieux d avoir les détails de la préparation et du coût car il paraît que c est relativement élevé. Combien de passagers « touristiques » êtes vous ?
J’avais entendu des opinions négatives sur cette ville, mais là au contraire j’ai envie d’y aller. Merci !
Wow qu’est ce que les photos sont belles.
En même temps les opinions négatives, il faut surtout pas écouter !
Il faut se faire son propre opinion, ça c’est mieux.
Réponse collective (désolée !) : les premières réponses à vos interrogations arriveront mercredi, avec le récit « vie à bord du Marco-Polo », et le carnet pratique suivra la semaine suivante !
Cette approche du cargo sonne un peu comme un passage initiatique je trouve...
Je ne savais pas qu’il était possible de voyager dans un cargo....AAllez, je file lire la suite, cela m’intrigue ! 🙂
Moi non plus je savais pas, et vu la taille de la chambre, cà fait presque envie. Bon a bord, ca doit manquer un peu d’animation je suppose ?
allo jaimerai bien savoire se quil faut faire pour trouver un gargo qui enbarque les personne merci davance pour les information denis
De très jolies photos ainsi qu’un joli article, Merci et bonne continuation.