Siby commence par une déception. Pour comprendre, il faut dire que nous y arrivons après avoir passé une nuit à Bamako mais surtout, des séjours géniaux chez Aminata à Ségou et chez Sidibé à Markala.
Nous arrivons donc avec l’espoir d’une nouvelle famille accueillante, où nous nous sentirons bien, avant de retourner sur Bamako pour attraper notre avion de retour.
Le contact local de la Case à Voyage s’appelle Daouda. Nous l’appelons la veille pour le prévenir, comme à chaque fois, et nous devons nous retrouver devant la mairie à notre arrivée par le premier bus. Sauf qu’il n’y a personne et que son téléphone est éteint. Heureusement, Siby est petite et tout le monde se connaît !
Il nous amène dans une auberge. Il s’agit de petites cases individuelles. C’est mignon, mais on réalise qu’il n’y aura pas de famille cette fois-ci : il est propriétaire du lieu, et c’est là qu’il accueille. On décline sa proposition de petit-déjeuner et il nous lance alors un « bon, ben on y va, alors ». On obtempère, sans vraiment savoir de quoi il s’agit, pensant qu’on va rencontrer quelqu’un, ou faire le tour de la ville. Daouda marche devant nous, rapidement rejoint par un ami à lui. On reste silencieux, derrière. Agacée par la fumée de leurs cigarettes respectives, je profite d’un moment où ils s’arrêtent pour demander notre destination. Il me répond alors, comme une évidence, « bah on va à l’Arche ».
A cet instant, il n’y a plus de retour en arrière possible : c’est un escroc qui profite de l’association, rien de plus, et il n’aura pas un sous de nous, autres que ceux destinés à payer nos nuitées. Le bonhomme s’apprêtait en fait à jouer les guides à la journée, en nous amenant voir une des curiosités locales, sans nous demander notre avis sur quoi que ce soit. A la fin de la journée, il nous aurait annoncé qu’il fallait les payer, lui et son copain, et certainement une somme assez élevée. Est-ce qu’on veut voir l’Arche ? Est-ce qu’on préfère commencer par autre chose ? Ou tout simplement, est-ce qu’on a de l’eau dans nos sacs ?
Bref, on le plante là, et malgré les sollicitations futures, il ne nous servira pas de guide, ne serait-ce que par principe. J’en profite pour vous déconseiller au passage son auberge, qui sert de chambre de passes certains soirs, dont les moustiquaires sont rafistolées avec du scotch et où on se fait un peu chier. Il nous a tellement bien accueilli que lorsque j’ai voulu payer, je n’ai même pas su où trouver sa maison, et j’ai dû demander à des gens dans la rue ! Et là, pas un bonsoir, pas un merci, rien. Bref, il y a plein d’auberges plus sympas, évitez Daouda Diawara.
Et tant qu’à parler du négatif, la ville entière a un peu tendance à vous prendre pour un pigeon : l’office de tourisme ne vous aide pas pour ne pas ruiner les guides, on vous demande de payer si vous cherchez votre chemin, et il y a un taxe pour blancs si vous essayez de vous promener. Pas étonnant, l’un dans l’autre, que cette ville ne soit pas sur la route de la majorité des agences et autres voyageurs.
Maintenant, passons au positif : on n’a pas payé la taxe, et on a réussi à tout faire sans guide, même si on a loupé une ou deux grottes !
Revenons à notre deuxième jour. Après avoir vainement cherché une grotte la veille, nous décidons d’aller à la fameuse Arche de Kamajdan, mais seuls. Une fois n’est pas coutume, nos guides nous sont inutiles : Siby n’est pas dans le Lonely Planet (...) ; quant au Viatao, ses cartes sont risibles. On marche donc plus ou moins au hasard, mais le chemin est bien balisé : un panneau à la sortie de la ville, puis des chemins sympas.
Deux heures plus tard, nos sommes en haut, et on exulte un peu de l’avoir fait sans guide, je dois le dire ! D’en haut, on domine la plaine et c’est assez impressionnant, surtout avec le vent. On est seuls, on reste longtemps à savourer avant de redescendre, doucement, pour déjeuner à « L’Auberge de l’Arche », petit truc à l’écart qui nous intriguait.
C’est tenu par un retraité français venu vivre ici, au calme. On y est super bien reçus, le cadre est agréable avec vue sur l’Arche, le repas très bon. On discute un peu de nos ressentis sur le Mali, sur Siby, et on termine sur un accord : revenir le lendemain pour prendre le petit-déjeuner et louer la moto du beau-frère.
En fait de moto, il s’agit d’un scooter chinois, le même que 90% des maliens (et thaïlandais, et laotiens, ...) à 100cc. Nous voulons aller à Djendjeni, la cascade, un petit îlot de paradis où l’on peut se rafraîchir. Dit comme ça, ça a l’air chouette, mais on va devoir le mériter : deux heures de cailloux, la pédale du frein qui se brise dès le début, et aucun panneau, sauf un, à la fin, qui indique... autre chose : le village d’à côté qui cherche ainsi à profiter des touristes en leur vendant des bijoux. Ce qui est idiot, d’ailleurs, parce qu’un simple stand de nourriture aurait eu beaucoup plus de succès mais il n’y a rien à manger là-bas.
Dès le départ, on galère à trouver le chemin. On demande pourtant à tous les gens qu’on croise... Ainsi, alors que le chemin n’a déjà plus rien de praticable pour notre pauvre scooter, on arrive devant une mare. On s’arrête, le temps de voir la profondeur et de se demander si c’est ça, la cascade, puis on se décide à traverser, ce qui est déjà bien compliqué avec les rochers glissants. Dix minutes plus loin, on se dit qu’on a dû se planter, que ça n’est pas possible, trop chaotique, et on décide de rebrousser chemin. Juste après avoir retraversé la mare, on rencontre deux chasseurs à vélo. Ils rigolent et nous disent qu’on était dans la bonne direction... On traversera donc cette fichue mare six fois dans la journée !
On finit par arriver enfin à la fameuse cascade. Une grande piscine naturelle et un petit filet d’eau, c’est réellement super agréable ! On y reste quelques heures, à se reposer, à explorer les environs, et aussi à nager, même si l’eau est glacée de prime abord !
Et vers 15h, on se décide à repartir : il nous faut trouver un garagiste sur le chemin pour réparer la moto avant de la rendre. On fait donc le chemin du retour sans encombre : c’est toujours étonnement facile dans ce sens-là... Le Belge galère un peu sans pédale de frein, mais je me laisse porter à l’arrière !
Arrivés au premier et unique village avant Siby, nous nous arrêtons. Au Mali, pas la peine de chercher une grande enseigne, les boutiques ne sont pas si reconnaissables ; en fait, il n’y a pas de grandes boutiques. On se contente de demander en montrant la pédale cassée. Un gamin en chaussures à talons (?) accompagne alors Marc jusqu’à quelqu’un qui saurait nous dépanner. Et je reste à attendre, au centre du village, rapidement cernée par les enfants du coin...
Il ne doit pas y avoir grand monde pour s’arrêter, alors je joue les attractions, entre photos des uns et démonstrations de trous. C’est une chose étonnante d’ailleurs, de les voir mimer la douleur lorsque je fais bouger les barres de métal qui transpercent ma lèvre et l’une de mes oreilles, alors même que les piercings sont très répandus ici (ils vont parfois dans les villes où les pros utilisent des pistolets).
Le Belge revient : il a trouvé le garagiste. Les enfnts nous suivent, ne semblant pas se lasser de nous dévisager, continuant de rigoler en se voyant dans mon écran LCD...
Mais voilà, impossible de faire rentrer la nouvelle pédale de frein, le modèle ne s’adapte pas. Malgré les coups de marteau. On paie quand même, le garagiste comme le gamin, même s’ils ne demandent rien, et aussi parce qu’il a bousillé une pédale pour rien. On fonce vers Siby, tenter notre chance chez un deuxième garagiste. Il galère, démonte tout, remonte, cours acheter la pièce, essaie, recommence, met de l’huile, et finit par tout faire remarcher ! Ouf ! Nous raconterons tout ça en rendant la moto, mais au moins, on la ramène dans le même état qu’au départ (voire mieux, vu l’état de l’ancienne pédale changée pour du neuf) !
Journée épuisante mais comme souvent, ce sont ces ratages qui font les bons souvenirs !
Dans le prochain et dernier épisode, on rentre à Bamako pour le petit bilan.
9 commentaires
Et bien dis donc vous en avez vécu des aventures palpitantes. Sur le coup ça doit être vraiment très frustrant et épuisant, mais comme tu le dis si bien à la fin les ratages te feront certainement sourire plus tard.
En tout cas j’aime vraiment beaucoup tes photos, c’est toujours aussi bien fait et les émotions ressorte très bien. Et j’aime beaucoup les dessins des enfants. C’est toi qui les à réalisés ? Pendant ou après le voyage ?
vriment superbe les croquis, les enfants tu les as bien croqués :)j’adore le deuxième (avec le jaune). Au fait maquillage enfantin, maquillage tout court ou symbole ?
quelle aventure ..
les dessins apportent un gros plus et se marient bien avec les photos
Les paysages sont magnifiques et sont bien rendu sur les photos
Tunimaal : quand je repense à nos voyages précédents, ce sont les histoires qui partaient mal qui ont fait nos meilleures anecdotes 🙂 Quant aux croquis, je ne poste rien ici dont je ne sois pas l’auteur (parfois une ou deux photo de Monsieur Oreille, mais dans ce cas c’est précisé.) et en l’occurrence ceux-ci ont été fait au retour, c’est plus simple de dessiner au calme !
Cecilevision : honnêtement, je ne sais pas du tout, mais je pencherai pour le jeu. L’une des gamines avait les sourcils décolorés, d’autres de la peinture jaune.. J’ai cherché, mais sans résultat convainquant. :/
Pyrros : hé bien merci 🙂
Chouette aventure encore une fois !
Merci 😉
Merci Tewoz 🙂 (hé, j’ai acheté de l’aquarelle hier, histoire d’essayer de mettre un peu plus de couleur ! Mais je scanne tout avant... !)
Les couleurs sur tes photos sont sublimes ! ça me fait un peu penser au genre de paysages qu’on peut voir en Australie.
En tout cas, que d’aventures ! mais vous vous en êtes globalement bien sortis 😉 et le coup de la pédale de frein, ça c’est une réelle expérience africaine 🙂
Que d’aventures ! Elles sont vraiment superbes tes photos, elles donnent envie d’aller y faire un tour. Pas de Pogo ce coup-ci ?
Donlope : je crois qu’on peut trouver pas mal de parallèles avec l’Australie, oui ! Enfin, dans mon imaginaire, on retrouve aussi ces grandes étendues, cette terre rouge...
(et le belge était très fier de raconter à tout le monde qu’il avait réussi à conduire sans la pédale 😀 )
Lucie : oula, je n’aurais pas oser sortir la Pogo ici ! Les gamins se bousculaient déjà pour être devant l’objectif, alors ça aurait été l’émeute si j’avais donné des tirages ! C’est un truc que j’ai retenu : je limite la pogo aux moments où il n’y a pas de foule, sinon c’est ingérable :/