fbpx

Irlande : visiter Derry-Londonderry

par Madame Oreille

Voyage en Irlande du Nord : Derry
You are new ente­ring Free Der­ry, un des sym­boles locaux

Derry ou Londonderry ?

Sur la route de Lon­don­der­ry, tous les pan­neaux de signa­li­sa­tion sont tagués : le Lon­don est rayé, ne lais­sant que le Der­ry. Je relis les quelques pages de mon guide par­lant de la ville. Que faut-il dire ? Der­ry ou Lon­don­der­ry ? Car c’est bien de la même ville qu’on parle, Der­ry-tiret-Lon­don­der­ry, tout au nord de l’Ir­lande du Nord.

Les ani­ma­teurs de télé­vi­sion diront Lon­don­der­ry une fois, avant de dire Der­ry. Les gens ne vou­lant frois­ser per­sonne diront Der­ry-Lon­don­der­ry. Mais bien sou­vent, on enten­dra sim­ple­ment Der­ry. Car il faut se sou­ve­nir de l’his­toire récente de l’Ir­lande du Nord, et com­prendre que Der­ry fut un des points prin­ci­paux de celle-ci. C’est d’ailleurs pour cela qu’il me paraît inté­res­sant de com­men­cer un voyage en Irlande du Nord par Der­ry : on appré­hende la par­tie « His­toire récente » avant de se plon­ger dans les paysages.

Voyage en Irlande du Nord : Derry
Le fleuve Foyle

Un mon­sieur m’a dit une phrase très inté­res­sante : la dif­fé­rence entre l’his­toire de France et l’his­toire d’Ir­lande, c’est que la leur est encore actuelle. Et force est de consta­ter que, par­tout, je vais croi­ser des gens qui auront souf­fert des évè­ne­ments, per­du un proche, connu des bles­sés. Pour autant, même si les convic­tions de cer­tains res­tent pro­fondes, tout le monde s’é­ver­tue à pas­ser à autre chose, à avan­cer. Inté­rieu­re­ment, je n’ai pu m’empêcher de faire le rap­pro­che­ment avec Sara­je­vo, ville magni­fique, gens accueillants, stig­mates encore visibles, et cet espèce d’i­né­vi­table point God­win, à chaque ren­contre, où la per­sonne évoque tou­jours la guerre encore récente. En tant que voya­geur, on est sur­pris : on ne com­prend pas pour­quoi cette dame nous dit que son fils est enter­ré à Sara­je­vo, pour­quoi ce mon­sieur nous dit que son frère a fait par­tie des pri­son­niers du « block H », ceux qui ont fait la grève de la faim. Tout cela nous semble bien trop intime, je ne me sens presque pas digne de recueillir ces his­toires sur les­quelles je n’ai pour­tant posées aucune ques­tion. Puis, le voya­geur com­prend que le local a besoin d’en par­ler, non pour se confes­ser mais pour pou­voir dire que tout ça est fini, qu’ils avancent vers autre chose aujourd’hui.

Voyage en Irlande du Nord : Derry
Cli­quez pour agrandir

Petit rap­pel historique

Pour plus de détails, vous pou­vez vous réfé­rer à Wiki­pé­dia mais pour la ver­sion courte, ce qu’il faut rete­nir, c’est qu’en 1920, l’Ir­lande a été sépa­rée en deux : l’Ir­lande du Nord res­tant atta­chée au Royaume-Uni. Vers la fin des années 60, des affron­te­ments ont débu­té entre les deux camps. On dit sou­vent qu’il y avait d’un côté les catho­liques et de l’autres les pro­tes­tants mais en réa­li­té, il s’a­gis­sait moins d’un conflit reli­gieux que poli­tique, les catho­liques étant en majo­ri­té natio­na­listes (et répu­bli­cains) et les pro­tes­tants unio­nistes (vou­lant res­ter atta­chés à la Grande Bre­tagne). Au coeur des pro­tes­tions, il y avait l’é­ga­li­té des droits civiques, notam­ment (le droit de vote étant accor­dé de façon pas très égalitaire).
Les affron­te­ments ont été très vio­lents, avec notam­ment le Bloo­dy Sun­day où l’ar­mée a ouvert le feu sur des mani­fes­tants natio­na­listes paci­fiques : c’é­tait à Der­ry, en 1972, 14 per­sonnes ont été tuées, dont la moi­tié étaient des ado­les­cents. Depuis les années 90, un pro­ces­sus de paix a été enta­mé, même s’il aura fal­lu presque deux décen­nies pour que la paix soit réel­le­ment effec­tive. A l’heure actuelle, il y a for­cé­ment encore quelques extré­mistes (mais quel pays n’en a pas...) mais les gens ont sur­tout envie de pas­ser à autre chose. J’au­rais ten­dance à croire que la crise aura aus­si aidé les gens à se sou­der plu­tôt que se déchirer.

Voyage en Irlande du Nord : DerryVoyage en Irlande du Nord : Derry

Derry et les fresques commemoratives

Der­ry ayant été un des bas­tions de cette révolte répu­bli­caine, la ville en garde quelques traces. Dont ce petit tiret qui rend son nom si com­pli­qué, les natio­na­listes ne vou­lant pas avoir un « Lon­don » (ai-je seule­ment besoin de vous dire que Lon­don est la ver­sion anglaise de Londres, la capi­tale bri­tan­nique ?) dans le nom de leur ville.
Le coeur de la résis­tance était dans un quar­tier nom­mé Bog­side, un quar­tier très popu­laire aujourd’­hui encore, où l’I­RA avait ses quar­tiers. Le Bog­side de Der­ry est connu pour ses fresques, des murs entiers cou­verts de pein­ture pour racon­ter les évè­ne­ments. On est plus dans le com­mé­mo­ra­tif que dans le reven­di­ca­tif, et ça prend aux tripes. On retrace ain­si 40 années de lutte, chaque fresque étant expli­quée par un petit pan­neau qui mérite une lecture.
Si vous visi­tez Der­ry, vous pou­vez vous joindre à des visites du quar­tier orga­ni­sées par les habi­tants. Ceux qui mili­taient hier se sont reconvertis...

Voyage en Irlande du Nord : Derry
Voyage en Irlande du Nord : DerryVoyage en Irlande du Nord : Derry

derry_plan

We want to move on : Derry capitale de la Culture

Pour l’an­née 2013, l’Ir­lande dans son ensemble orga­nise de nom­breux évè­ne­ments, et Der­ry en pro­fite dou­ble­ment, ayant été élue capi­tale de la Culture. Du coup, si vous y pas­sez, regar­dez le plan­ning, il y a des choses très variées aux­quelles assis­ter ! (Lien : Der­ry sur le site de l’Of­fice de Tou­risme d’Ir­lande en France)
De mon côté, j’ai pris part au « Car­ni­vale of Colours ». En soi, ce n’est pas conçu pour être une mani­fes­ta­tion tou­ris­tique mais c’est jus­te­ment ça qui me plai­sait : deux après-midi, dans un parc, avec des familles irlan­daises venues s’a­mu­ser. Concerts, conteurs, cours de djem­bé, artistes de rue, pièces de théâtre, de cirque, ate­liers maquillage... Il y en avait pour tous les goûts. L’am­biance était à la détente, aux rires.

Voyage en Irlande du Nord : DerryVoyage en Irlande du Nord : DerryVoyage en Irlande du Nord : DerryVoyage en Irlande du Nord : DerryVoyage en Irlande du Nord : Derry

Mon premier marathon

En paral­lèle au car­na­val se tenait le pre­mier mara­thon de Der­ry, le Wal­led City Mara­thon (en réfé­rence aux rem­parts qui cerclent l’hy­per centre-ville. Non, je n’ai pas essayé de le cou­rir, j’ai juste appré­cié le suivre un petit peu. Il par­tait devant mon hôtel, ce qui était fort pra­tique, puis fai­sait une boucle dans la cam­pagne et sillon­nait la ville dans tous les sens. Ici, pas de kenyans sur­en­traî­nés, mais sur­tout des locaux, contents de par­ti­ci­per. D’ailleurs, au bout de 5 miles, beau­coup étaient déjà en train de mar­cher. Mais qu’im­porte, même en arri­vant 8h après les pre­miers, ils seront tou­jours applau­dis sur le che­min. Et je crois que c’est ce que je retien­drai de ce mara­thon : des gens qui ne se connaissent pas, et s’en­cou­ragent pour­tant mutuel­le­ment (enfin, j’ai quand même eu l’im­pres­sion que beau­coup se connais­saient). C’est hyper émou­vant, de voir quel­qu’un pas­ser, avec les jambes qui tremblent mais l’en­vie d’al­ler jus­qu’au bout : et là, les pas­sants l’ap­plau­dissent, les voi­tures klaxonnent. Et je trouve ça hyper cou­ra­geux, d’al­ler jus­qu’au bout, même si le vain­queur aurait déjà eu le temps de le faire trois fois.
Il y avait même quelques fau­teuils rou­lants (juste dépas­sés par le trio de tête des valides, mais c’est logique vu le nombre de côtes du par­cours), et là, on se dit qu’ils ont une sacrée moti­va­tion... En bref, je n’ai jamais aimé regar­der le sport. Pour­tant, j’ai pas­sé un bon moment sur le mara­thon, bon endroit pour dis­cu­ter, pour voir toute une ville sou­te­nir 2000 coureurs.

Voyage en Irlande du Nord : DerryVoyage en Irlande du Nord : DerryVoyage en Irlande du Nord : Derry

Dans le pro­chain épi­sode, on prend la route pour com­men­cer l’iti­né­raire sur les traces des pay­sages de Game of Thrones (l’Ir­lande du Nord étant l’un de leurs prin­ci­paux lieux de tour­nage), dont vous retrou­vez le résu­mé et tous les lieux géo­lo­ca­li­sés ici.

Poursuivre la lecture vers un autre article..

4 commentaires

Curiosités à NY 19 juin 2013 - 18:36

J’a­dore la pho­to des fan­tomes qui courent le mara­thon ! Top!!!

Répondre
Carnet d'escapades 20 juin 2013 - 17:21

J’a­vais res­sen­ti exac­te­ment la même chose que toi à Sara­je­vo. Des per­sonnes t’ar­rêtent dans la rue pour te par­ler de la guerre, mais j’a­vais l’im­pres­sion que cela leur fai­sait du bien aus­si de voir des tou­ristes venir et s’in­té­res­ser à leur his­toire. C’é­tait très tou­chant. C’est inté­res­sant de savoir que tu as eu un peu le même res­sen­ti en Irlande...

Répondre
Oreille 21 juin 2013 - 10:23

Oui, très bizarre cette sen­sa­tion, parce que tu sais pas trop quoi répondre... En soit, leur his­toire m’in­té­resse, mais je suis quand même mal à l’aise lors­qu’un incon­nu me parle de choses aus­si intimes que la mort d’un proche, avant même de me dire son prénom.
Mais oui, je suis sure qu’ils sont heu­reux de voir les touristes.
D’ailleurs, cer­tains sont heu­reux de voir le G8 là-bas, non parce qu’ils sou­tiennent ce qu’il va s’y pas­ser, mais parce que ça veut dire qu’une page s’est tournée...

Répondre
Charles 4 juillet 2013 - 8:45

J’aime bien la par­tie his­toire de ton article.
L’his­toire de l’Ir­lande m’a tou­jours inté­res­sé, le Bloo­dy Sun­day, etc...
Tes pho­tos sont superbes en tout cas, on retrouve bien l’am­biance Irlandaise !
Mer­ci beau­coup pour la lecture.

Répondre

Laisser un commentaire

Ce site utilise Akismet pour réduire les indésirables. En savoir plus sur comment les données de vos commentaires sont utilisées.