Extraits des carnets de notes tenus durant ces cinq semaines passées à Sumatra, en Indonésie, avec Petite Oreille. Un voyage lent, en immersion dans des familles pour découvrir les différentes cultures par le quotidien, pour créer des liens, des échanges. Un voyage magique !
L’itinéraire de ce voyage nous a permis de découvrir trois des (nombreuses !) facettes de l’Indonésie. Avec Petite Oreille, 3 ans, nous sommes parties mi-avril pour un peu plus d’un mois à Sumatra.
Notre séjour a débuté dans un petit village à côté de Bukittinggi, au Sumatra Occidental. Nous y sommes restées deux semaines, à partager le quotidien d’une famille. Puis nous avons rejoint Bukit Lawang parce que je ne pouvais pas me rendre à Sumatra sans aller observer les orangs-outans, un vieux rêve d’enfant. Enfin, nous avons conclu le séjour par deux semaines d’immersion dans une deuxième famille, cette fois-ci, sur les îles autour de Belitung.
Trois lieux totalement différents : nous sommes passées des rizières à la jungle puis aux plages paradisiaques !
Je suis partie avec tout mon matériel pour filmer notre voyage, les découvertes de Petite Oreille, nos rencontres : je vais réaliser une série de vidéos pour Evaneos, qui organise des voyages sur-mesure en direct avec des agents locaux, dont je partage les valeurs. Je vous explique tout dans cette vidéo :
(montée sur place, avec mon ordi de voyage à l’agonie !)
Pandai Sikek, Sumatra Occidental
Pandai Sikek, c’est un petit village au milieu des volcans, entouré par les rizières. Ici vivent les Minangkabau, une ethnie qui a la particularité d’être musulmane et matriarcale. Nous y avons été accueillies par Non et Dar, deux sœurs, qui hébergent les petites-filles de leur autre sœur. Dar tisse le songket, un tissu réputé pour sa finesse qui fait la réputation des Minangkabau. Quant à Non, elle s’occupe des récoltes aux champs et tient une petite boutique à l’entrée de la maison.
- 17 avril
Paris – Amsterdam – Kuala-Lumpur – Jarakta – Padang – Pandai Sikek. Le dépaysement est total.
C’est le défilé dans la maison de nos hôtes, tous les voisins viennent nous rencontrer. On me présente des dizaines de personnes, on m’explique plein de choses. Je m’efforce de hocher la tête en souriant, je ne comprends pas un mot. Tout le monde sourit à Petite Oreille, lui caresse la joue.
- 19 avril
Riska nous a pris sous son aile. Nous avons le même age, et nos filles aussi. Elle parle un peu anglais, complète avec Google Translate quand il faut. On arrive à échanger. J’ai l’impression qu’on se ressemble beaucoup, même si nos cultures sont très différentes. Petite Oreille et Tasya s’amusent bien ensemble. Tasya a des poupées Reine des Neiges et a décrété que Petite Oreille ressemblait à Anna.
Les cheveux de Petite Oreille ont beaucoup de succès. Nos peaux « blanches et douces » également. Aux dires d’Imelda, on est plus belles que les anglais pleins de taches de rousseurs et que les américains couverts de boutons...
- 20 avril
Makan, makan. Où que j’aille, il faut manger. Et pas juste picorer un truc par politesse, non on me fait manger plein de choses, tout le temps. Ça fait partie de l’accueil dans chaque maison : on met quelque chose sur la table, même s’il est 11h30 et que je vais rentrer déjeuner d’une minute à l’autre.
- 21 avril
Petite Oreille joue à la dînette avec Nafla. Nous sommes chez Ces et Imelda avec Riska. Imelda me dit en rigolant qu’elle n’aime pas trop les films français. Elles échangent quelques mots entre elles, en Indonésien. Visiblement elles ont vu des films sur le câble. J’entends le mot « porno ». Elles rigolent. Je dis « de ce que j’ai compris, tu as regardé des pornos français à la télé et tu ne les as pas trouvés terribles ». Elles rient de plus belle. Qui eût cru qu’un jour je me retrouverais à parler films érotiques avec trois femmes voilées ?!
- 22 avril
Je ne capte un peu de réseau, faible et intermittent, qu’en montant sur les hauteurs du village. J’ai l’impression d’être dans un film de Kiarostami. L’immersion va donc s’accompagner d’une déconnexion.
- 23 avril
A la bibliothèque avec Riska et les enfants, nous avons trouvé un lexique français / indonésien. Riska l’a parcouru très sérieusement, me demandant de lui lire les mots qu’elle ne savait pas prononcer. Le son « u » est compliqué pour elle. Elle a découvert que le mot français « hibou » se prononce comme le mot indonésien « ibu », qui signifie maman. Elle a éclaté de rire et depuis le raconte à tout le monde !
- 26 avril
Petite Oreille parle de gymnastique au lieu de prière. Elle essaie de les imiter, toute concentrée, ce qui les fait sourire.
Tous les soirs, Dar, Tessa et Non se relaient pour faire leur prière : même tapis, même voile. La télé reste allumée, la musique est parfois à fond.
J’ai vu Riska prier pour la première fois aujourd’hui, c’était expéditif. Quand je lui avais demandé si elle faisait les 5 prières, elle m’avait répondu du tac au tac « j’ai mes règles ».
La religion est très présente, mais semble surtout culturelle. Les femmes ne portent le voile que quand elles le veulent, ou quand elles veulent se mettre sur leur 31 pour sortir en ville. C’est un accessoire de beauté, il est coloré, couvert de brillants, fait dans un tissu à fleurs, ou attaché avec de belles broches. Il n’a rien d’austère.
- 28 avril
Ici tout le monde semble se laisser vivre (même s’ils se lèvent tous à 5h). Tout va doucement, les horaires sont flexibles, rien ne presse.
- 30 avril
Sur la route vers Padang, des dizaines de scooters sont arrêtés sur le bas côté. Je me demande d’abord s’il y a quelque chose de particulier qui mérite l’arrêt : un bon restaurant, une vue ? Mais non, c’est un contrôle de police ! Les gens s’arrêtent avant et attendent, afin d’éviter le contrôle. Ils ne se cachent pas, ils sont simplement assis à discuter. Peu ont le permis, mais pourtant je n’ai encore vu aucun accident et, du moins dans le village, tout le monde roulait très doucement.
Voici 10 jours qu’on partage le quotidien des habitants avec Petite Oreille. On fait des progrès en indonésien et elle apprend des mots super utiles. Elle sait donc dire Bonjour, mais aussi poisson, mouche, fourmi ou encore concombre. ?#ImmersionSumatra avec @Evaneos pic.twitter.com/3KuIkN5TTL
— Oreille (@Madame_Oreille) 26 avril 2018
Instantanés d’Indonésie : parcourir les champs, enfiler le costume traditionnel avec une copine.
Je fais des images, et Petite Oreille se crée de sacrés souvenirs ! ❤️#ImmersionSumatra avec @Evaneos#WonderfulIndonesia pic.twitter.com/20FVphLJDT— Oreille (@Madame_Oreille) 3 mai 2018
Coucou depuis Sumatra !
Ça, c’est notre promenade quotidienne avec Petite Oreille. Au milieu des rizières et des cultures, dans la vallée. Je ne m’en lasse pas !#ImmersionSumatra avec @Evaneos#WonderfulIndonesia #Evaneos pic.twitter.com/G4pwOWtEBv— Oreille (@Madame_Oreille) 24 avril 2018
Bukit Lawang, incursion dans la jungle
Bukit Lawang, c’est une petite ville dans le nord de Sumatra. Les restaurants et les hôtels sont alignés le long de la rivière. L’endroit est touristique, mais à aucun moment nous n’avons ressenti la foule. Peut-être avons nous eu de la chance.
Tout le monde vient ici pour la même raison : les orangs-outans. Autrefois, on trouvait une plateforme de nourrissage à l’entrée du village. C’était dans le cadre d’un projet de réinsertion de ces grands primates. Tous ceux qui se trouvaient en captivité ont été remis en liberté. Aujourd’hui, tous ont repris la vie sauvage, et la plateforme est fermée, il ne reste que la petite clinique un peu plus loin. Pour autant, on les observe toujours assez facilement à Bukit Lawang, justement car ils sont habitués à l’humain et ne fuient pas !
Nous avons été particulièrement chanceuses en ayant l’opportunité d’admirer plusieurs femelles, un jeune mâle et plusieurs petits, dont un dans un nid.
Petite Oreille a été ravie de pouvoir les observer aussi bien, et notre guide a été parfait, se calant sur son rythme, nous laissant le temps de profiter des orangs-outans, mais aussi des autres singes croisés pendant cette journée.
Les autres jours nous nous sommes promenées dans le village, avons été voir une grande grotte remplie de chauve-souris... et tous les soirs nous nous sommes baignées dans la rivière, en regardant les macaques s’amuser sur les passerelles.
Qui dit Sumatra dit forcément petite visite à nos cousins. Trek de 6h pour les observer dans la jungle, avec une Petite Oreille toute contente (et un super guide !) ❤️#ImmersionSumatra avec @Evaneos#WonderfulIndonesia pic.twitter.com/zjLokZhvF9
— Oreille (@Madame_Oreille) 8 mai 2018
Entre Suak Gual et Belitung
- 7 mai
Ferry vers Gual ce matin. C’est un petit bateau. Ils installent des planches pour descendre les scooters avant de bien les attacher au bateau. Ce sont les mecs du bateau qui s’en occupent, ils maîtrisent la technique. Manier un scooter de plus de 100kg, sur une planche de 30cm de large...
Trois retardataires arrivent après que le bateau soit parti. Aussitôt, le capitaine fait marche arrière, les employés remettent les planches, et en trois minutes tout le monde est prêt à repartir.
- 7 mai
Quand t’es couchée, en culotte parce qu’il fait super chaud, mais que tout le village veut voir à quoi ressemblent les deux touristes : les gens n’hésitent pas à ouvrir le rideau (pas de porte) ! J’ai dit « malam », ils ont souri en nous regardant. La situation semblait être d’une banalité absolue. Sauf pour moi.
- 8 mai
On ferme les fenêtres à la nuit tombée, même s’il fait encore très chaud, et on tire les rideaux. Niamouk ? Ular ? Non, rien à voir avec les bestioles qui pourraient rentrer, c’est par peur des esprits.
Pourtant, la porte reste ouverte et tout le monde s’installe dehors, sur la terrasse. Toute les maisons ont une terrasse couverte devant la porte d’entrée. On enlève les chaussures avant de monter dessus.
- 9 mai
Aucun problème avec le corps. Notre hôte nous accueille en serviette de bain, souriante. J’ai vu plusieurs autres femmes en serviette sur leur perron, tout juste sorties de la douche. Et une en sous-vêtements en train d’étendre sa lessive. Après tout, il est commun que les villageois aillent se laver à la rivière (tout le monde doit alors y aller ensemble : non pour montrer qu’on se lave, mais pour ne pas être pris pour un pervers qui resterait à regarder de loin).
???
Souvenirs des plages de Belitung avec Sisi, Kira, Teo, Gojink, Gaga, Dapin et Petite Oreille. Sable blanc, eaux translucides, coraux magnifiques... et pas un seul touriste ! #ImmersionSumatra avec @Evaneos #WonderfulIndonesia pic.twitter.com/rzc8EgmguW— Oreille (@Madame_Oreille) 22 mai 2018
Je vous ai dit combien Petite Oreille et moi avons été heureuses ces 5 dernières semaines en Indonésie ?
❤️
Partager le quotidien d’une famille, c’est avoir le privilège d’assister à ces moments de partage, d’échange, de rires. #ImmersionSumatra avec @Evaneos pic.twitter.com/T4a1G8cr2S— Oreille (@Madame_Oreille) 23 mai 2018
- 8 mai
Sortie en bateau avec Gojink, Yudi et son fils Gaga. Il n’y avait pas un nuage ce matin.
Le ciel commence à se noircir en début d’après midi. On se baigne avec les enfants en regardant la pluie tomber au loin, sur d’autres îles. Mais au premier éclair, tout le monde remonte dans le bateau : on rentre. Ils ont très peur de l’orage. Les éclairs tombent tout autour de nous. La pluie me cisaille le dos. Les vagues font tanguer le bateau dans tous les sens. Petite Oreille est blottie contre moi, Gaga contre Gojink. On se serre tous les quatre. Gaga est frigorifié. Capitaine Yudi est concentré. Il faut gérer les vagues mais aussi contourner les coraux qui pourraient nous bloquer. On ira se réchauffer chez lui, en arrivant, trempés jusqu’à l’os.
- 7 mai
Aucune table à manger dans les maisons. On installe des tapis partout, en fonction de la pièce et de ce qu’on y fait. Dans la salle à manger, il y a les tapis pour le repas, qu’on secouera dehors ensuite (pour ne pas laisser de miettes à l’intérieur, les fourmis arrivent vite). Dans le salon, il y a le tapis moelleux pour la sieste, pour jouer, ou regarder la télévision. Dans l’entrée, il y a le tapis plastifié pour s’installer sur la terrasse.
- 15 mai
Nos voisines ne font pratiquement rien de la journée : elles s’installent sur la terrasse et papotent. Parfois toutes sur la même terrasse. Les enfants vagabondent autour des maisons. Pas de route ici, uniquement un petit chemin.
- 12 mai
Tout le monde fait la sieste. Ils se lèvent à 5h30, et se couchent tard pour profiter de la fraîcheur. Alors après manger, quand la chaleur est au plus fort, ils se reposent, enfants comme adultes.
- 18 mai
L’Islam de Belitung est teinté d’animisme. Ils croient aux esprits, ils croient que certaines personnes voient les esprits. C’est un « don » qui peut être décelé à la naissance et pour lequel il faut être fort, sous peine de perdre la tête. Oki était souvent malade, alors le chaman a conseillé aux parents de changer son nom. On leur a aussi dit, quand il était encore tout bébé, qu’il avait le don. Alors ses parents l’ont couvé, maintenu à l’écart de ce qui pourrait être éprouvant pour lui. C’est pour ça qu’à bientôt 4 ans, il a peur de tout.
Un peu plus au nord, il y a un endroit où les hommes côtoient les crocodiles. Nous y sommes allées, les crocodiles sont nombreux et gigantesques. Mais le chaman a un accord avec l’esprit gardien des crocodiles : à cet endroit de la rivière, on cohabite. Les pécheurs passent, ramassent les coquillages, récitent un mantra si deux yeux les regardent. Par contre, ça ne fonctionne que là-bas. Dans la rivière d’à côté, il n’y a pas de traité de paix entre humains et crocodiles. C’est très sérieux. Le mot crocodile est tabou sur les bateaux.
- 19 mai
Adieux, promesses de se revoir, signes à travers la vitre de l’aéroport.
Cette séparation est encore plus dure que la première, car derrière, c’est le retour à la maison qui nous attend. Nous entamons le périple vers la France avec une boule dans la gorge.
Le voyage #ImmersionSumatra a été réalisé en partenariat avec Evaneos, qui organise des voyages en direct avec des agents locaux.
Merci à Option Way ainsi qu’à l’Office de Tourisme d’Indonésie pour leur soutien dans ce projet.
11 commentaires
Superbes photo comme d’habitude.
Au sujet de l’anecdote sur les films pornos : en Indonésien « film perancis » (film français) c’est de l’argot pour dire film porno tout simplement. « film biru » (film bleu) se dit aussi.
Si je me souviens bien la raison est que à une époque plutôt ancienne (bien avant Internet) il y avait une sorte de filière clandestine de diffusion de films erotiques français en Indonésie. Et comme nos films classiques ont une diffusion inexistante, le terme est resté.
Je suis vraiment toujours aussi subjuguée par ton travail. Il y a des photos dans ce billet..... Je les achèterai toutes... En plus, Sumatra et les orang outans, tu parles en ligne directe avec mon coeur. Je voulais aller faire du volontariat là-bas. Merci 😀
Je suis vraiment toujours aussi subjuguée par ton travail. Il y a des photos dans ce billet..... Je les achèterai toutes... En plus, Sumatra et les orang outans, tu parles en ligne directe avec mon coeur. Je voulais aller faire du volontariat là-bas. Merci 😀
Salut Aurélie !
Ton carnet de voyage est captivant et donne tellement envie de partir découvrir ce coin du monde et ses habitants ! Merci de nous en mettre plein les yeux et bravo pour ce partenariat en totale transparence.
On attend avec impatience les vidéos !
Quelle expérience magique ! C’est magnifique.
Salut !
Merci pour cet article aux superbes photos, qui permettent de partager et magnifier la vie quotidienne.
L’idée des anecdotes en mode « carnet de voyage » est excellente !
Les retours sont toujours difficile, j’espère qu’avoir une famille et un chez soi permet de les adoucir. 😉
Hâte d’être en septembre pour pouvoir voir tes vidéos ! 😀
Salut !
Bravo et merci pour ces magnifiques photos qui subliment la vie quotidienne.
L’idée des anecdotes en mode « carnet de voyage » est excellente !
Les retours sont toujours difficile, j’espère qu’avoir une famille et un chez soi les adoucis un peu ! 😉
Hâte de voir les vidéos en septembre. 🙂
Salut,
Bravo et merci pour ces magnifiques photos qui subliment la vie quotidienne. L’idée des anecdotes en mode « carnet de voyage » est excellente !
Les retours sont toujours difficile, j’espère qu’avoir une famille et un chez soi les adoucis un peu 😉
Hâte de voir les vidéos en septembre 🙂
J’adore cette lumière presque irréelle sur tes photos !
Super article, et magnifique voyage.. elle en a, de la chance, Petite Oreille, d’avoir une maman globe-trotteuse !!!!
Merci de nous faire voyager aussi 🙂
J’adore lire tes notes de voyage, c’est tellement naturel, tellement beau. Et Petite Oreille est d’une mignonnerie ! (Je veux la même plus tard)
Je pars dans quelques jours pour West Sumatra pour un voyage en immersion à la rencontre des Minangkabau et des Mentawaï. Ton article me rend impatiente !