Lorsque j’écris un article ici, ou lorsque je monte une page de carnet de voyage, je constate une chose : j’aime quand les photos communiquent entre elles. Bien sûr, ça ne sert à rien lorsqu’on poste ses photos sur Flickr, Facebook, ou n’importe quel site où elle sont affichées une par une (et où une sélection drastique sur les meilleures est donc plus efficace), mais si on essaie de s’inscrire dans un récit, c’est intéressant qu’il ne passe pas que par les mots.
On va dire qu’il y a deux façons d’aborder la chose : soit on conçoit une série autour d’un thème, soit on essaie de faire un reportage sur son voyage. Travailler avec un thème peut être à la fois intéressant et frustrant : il va falloir faire des photos réunies par un fil rouge. Photographier des gens effectuant le même travail à travers le pays (ou le monde), se concentrer sur un âge, un type d’événement... Les exemples ne manquent pas. Et là-dessus, je n’ai qu’un conseil : essayez de traiter l’ensemble de la série de la même manière, pour jouer l’unité à fond. Ce n’est qu’un sentiment personnel, mais je trouve que ce genre de série marche moins quand on alterne photos en couleurs et noir & blanc, format carré et panoramique, gros contraste et effets vintage. Bref, on doit rentrer dans un univers et il doit être cohérent.
L’orsqu’on essaie de rendre compte de son voyage, c’est plus compliqué. Il faut à chaque fois se demander si on peut évoquer un lieu avec une seule photo, raconter un événement avec un seul portrait. Et là, je crois qu’il faut presque travailler comme un cinéaste : aller chercher des cadrages différents. En fait, on a (et moi aussi !) trop souvent tendance à se limiter à la jolie photo, et ne pas chercher plus loin. Mais dans le cadre d’un carnet, ou d’un article de blog, il faut plonger le lecteur-spectateur au cœur de l’action, ou au moins du lieu.
Histoire d’illustrer un peu mon propos, je vous propose deux exemples.
Le premier est issu du futur carnet malien. Il y aura du texte autour, racontant l’histoire d’une pédale de frein cassé, et comment nous l’avons faite réparer. J’aurais pu me contenter de la photo du milieu, le plan large où l’on voit le garagiste accroupi et la moto, mais je trouvais intéressant de profiter de la jolie lumière pour exploiter un peu plus l’histoire.
De manière générale, faire des gros plans peut sembler peut intéressant sur place, mais se révèle souvent efficace : c’est le petit détail qui met dans l’ambiance. Ainsi, aligner des photos larges et serrées, des portraits et des détails, permet de contextualiser l’histoire.
Même principe avec ce deuxième exemple, tiré d’un vieil article sur Barcelone. Je voulais parler du Parc Güell, en sachant que tout le monde a des images en tête en pensant à ce haut-lieu du tourisme.
J’ai mélangé des plans larges sur cette architecture qu’on connait tous pour la vue d’ensemble, une photo avec des oiseaux pour montrer que c’est avant tout un parc avec arbres et des gros plans parce que ces mosaïques caractérisent vraiment le lieu.
A l’échelle d’un voyage, on pourra essayer de mélanger scènes de vie, paysages, gastronomie... Bref, montrer le pays sous tous ses coutures !
22 commentaires
Merci Madame oreille pour cet article très sympa ! Tes articles « pédagogiques » sur la photo et la photo de voyage sont toujours aussi utiles et pleins de conseils pratiques
Très juste, et très bien vu, comme toujours !
🙂
elles sont rares les photos qui se suffisent a elles mêmes, il est nécessaire de les entourer de texte ou d’autres photos pour permettre aux lecteurs de mieux appréhender le sujet ...
l’aperçu des photos est... ouah.
Cela fait une belle mosaïque, le choix des couleurs, des angles, des... enfin, un jour, avec du boulot, j’y arriverai aussi, nah !
J’aime toujours autant tes photos, et je suis tout à fait d’accord avec toi sur le fait qu’une seule photo ne raconte jamais une histoire dans son ensemble. L’idée du montage de plusieurs photos ensemble est juste excellente. Après je pense qu’il faut bien choisir les photos pour ne pas saturer l’oeil, parce que sur le Net plusieurs couleurs, photos, lumières, format d’un seul coup j’avoue que ça peut un peu perturbé. Tu en pense quoi ?
Karibou, Corinne : merci à vous 🙂
Pyrros : en général, avec une seule photo, on dira « oh c’est joli » mais on aura souvent du mal à trouver le lieu sans légende. Et rien que ça, je trouve que ça justifie de travailler en série, tout du moins pour le voyage.
Tunimaal : C’est pas faux, il faudrait essayer d’harmoniser les couleurs, de ne pas mettre n’importe quelles images côte à côte... Et gérer les « blancs ». En dessin, on apprend à composer avec les pleins et les vides, il faudrait appliquer les mêmes règles, pour que l’œil respire pas endroit.
Encore une fois, c’est plein de bon sens, mais c’est vraiment bon à rappeler.
Ce que j’aime particulièrement dans tes articles c’est justement les photos accolées les unes aux autres qui mise ensemble racontent une histoire.
Je m suis déjà fait la remarque que je ne prétais pas suffisamment attention aux détails mais me contentait d’embrasser la vue globale du regard alors que c’est ces petits détails que j’aime le plus chez les autres.
Je ne peux qu’agréer... Quoiqu’un fil rouge peut-être de traiter un lieu de façon photographiquement différente. ;D ;D ;D
Juste pour le défi, t’as pas envie d’essayer de résumer quelques uns de tes voyages en une photo et de nous raconter pourquoi ?
J’en parlais justement avec des voyageurs il y a quelques jours : faire une bonne photo c’est facile, le vrai boulot de photographe (amateur ou pro) c’est de pouvoir sortir une série cohérente, couvrir un sujet en gardant une unité de style, en parvenant à raconter quelque chose.
Bon sinon je pourrais dire « très bon article », mais ça devient fatiguant a la longue 😉
Je fais souvent des « séries » en observant des particularités locales, par exemple à Venise j’ai fait plusieurs pages thématiques sur :
– les petits ornements dorés qui tiennent les pompons des gondoles (en forme de chevaux, d’animaux mythiques...) ;
– les « palines », ces poteaux en bois peints de deux couleurs en spirale qui marquent les embarcadères ;
– les sonneries de portes ;
– les « enseignes horizontales » : ce sont des panneaux de mosaïque scellés dans le sol qui signalent des magasins, il y en a un bon nombre autour de la place St Marc.
Autres exemples :
– les plaques en fonte qui bouchent les égouts, les réseaux d’eau, d’électricité, etc. (Prague, Luxembourg) ;
– les plaques de rues, qui comportent souvent les blasons des villes ou qui peuvent être bilingues (Luxembourg, Pays Basque...).
Je complète mon message précédent avec un lien vers le site Photoservice où sont stockés mes albums photo ; ce lien vous permettra de voir les pages que j’ai créées sur Venise :
http://www.photoservice.com/albums_en_ligne/album.cfm?ap=0%2BT%40M%2BJ%29%261YOCXZGZ276A%23%40%20%20&e=1670
mot de passe : venise
Attention, c’est beaucoup moins sexy que sur ce blog (présentation diaporama basique, photos dans l’ordre des noms de fichiers, donc pas dans l’ordre de l’album) et il faut se souvenir que chaque photo est conçue pour être imprimée en 20×27.
faire une bonne photo c’est facile.
j aimerai pouvoir dire ça et surtout voir les photos de ceux qui l ont dit .
pour beaucoup une bonne photo c’est une photo nette et bien exposé mais heureusement ce n est pas que ça
Tres bons examples de séries de photos qui permettent de bien comprendre ce que tu veux dire. Je prends note comme d’habitude... 😉
Piotr : désolée, pour une raison indéterminée, tu étais rendu directement dans les spams... Donc, oui, les collages bordéliques, en fait, ça s’organise : je fais vachement gaffe à varier les rotations pour éviter les parallèles, à ce que ça déborde franchement, etc. Mais ce sera évoqué dans un prochain article du dossier scrapbooking !
Donlope : franchement, je n’y faisais pas du tout attention au début. Mais c’est là que tenir un blog, faire des carnets, etc. fait progresser : à force de râler sur une photo qu’on n’a pas prise, sur des images ratées, hé bien on essaie de faire attention ! Quand je regarde les photos de mon premier voyage, je me mords vraiment les doigts !
Mélissa : honnêtement, à chaque fois que j’isole une photo, je trouve qu’il lui manque quelque chose. Disons que ça s’affiche dans le salon mais que ça ne raconte rien 🙂
Tu as des exemples de fils rouges où le traitement diffère d’une image à l’autre ? Je ne vois ça que dans le cadre d’une expo multi-auteurs.
Gaspard : une des expos qui m’a le plus marquée, c’est celle de Klein, à Beaubourg, il y a quelques années. On y voyait ses planches contact tirées en très très grand, avec les croix, les cercles. Et on réalise l’importance du choix, réussir à sélectionner la meilleure photo quand seul un détail diffère. Je crois que c’est là que l’œil joue vraiment un rôle primordial, parcourir toutes ses photos et savoir n’en garder que quelques unes...
Fwronecki : très bons exemples de séries à faire ! Des petits détails qui ne prennent leurs sens que quand il vont par dizaines !
Le Chat Photographe : je pense qu’il ne fallait pas le comprendre dans le sens où il suffit de déclencher pour faire une bonne photo, mais plutôt dans le sens où il est plus difficile de construire quelque chose de cohérent, un ensemble.
Cet article est vraiment excellent, et après 2 mois de voyage je dois dire que je suis complètement d’accord avec toi, et que j’ai fait les mêmes erreurs (trop se contenter de la jolie photo notamment, et puis ne pas assez travailler sur des séries en réalité).
Bref, t’aurais du l’écrire avant que je parte ;P
Merci pour cet article.
Effectivement, on constate que la frontière entre le projet photographique et la photo de vacances semble mince, et pourtant elle est loin de l’être. Alors que la seconde est plus un « snapshot » d’un moment, le premier est beaucoup plus lourd et est issu d’une vraie réflexion en amont.
Laurent : ahah ! Oh, ça ira, tu es quand même dans l’un des pays les plus photogéniques au monde !
Martin : c’est un truc que je répète souvent ici, faire des photos pendant et voyage et voyager pour faire des photos sont deux choses très différentes, où on ne met pas les mêmes chances de son côté. Alors à nous, voyageurs, vacanciers, de bien nous organiser pour faire le maximum ! Et puis, comme toujours, on progresse avec le temps, on devient plus rapide, on réfléchit mieux...
[...] La logique de la série dans la photo de voyage | Madame Oreille [...]
J’ai découvert ce site ce matin même, et j’ai lu beaucoup (trop) de vos articles (j’ai pas pu avancer aujourd’hui au boulot, chaque article renvoyant un lien..:) ), mais j’ai appris beaucoup de choses et vos astuces sont effectivement pleines de bon sens, mais je crois que quand l’on débute, allons savoir pourquoi, la jugeotte parait nous manquer. Merci donc pour ces articles et l’envie que vous nous donner.
[…] La logique de la série dans la photo de voyage | Madame Oreille […]
Madame oreille, tout simplement pour vous remercier pour vos articles les plus passionnants les uns que les autres qui me valent de passer des soirées entières sur votre blog !
Bonjour, j’ai une petite question : peut-on faire un post traitement sur chaque photo que l’on veut mettre dans un carnet de voyage ? et combien de temps cela prend ? Je demande ça car quand on fait des séries justement, cela fait beaucoup de photos et j’ai vu que dans tes carnets, il peut y avoir jusqu’à 200 photos non ? donc fais tu un post traitement pour chaque photo une par une ? ou par série ? ou pas de post traitement pour certaines photos ?
Je suis en train de préparer un carnet et j’ai peur du travail si je garde beaucoup de photos ...
Merci