Je vous raconte comment je suis devenue photographe, et comment aujourd’hui j’arrive à vivre en voyageant et en faisant des images.
Je n’ai jamais parlé ici de comment je gagne ma vie. Je préfère, et de loin, parler de voyage et de photographie que des dessous de la blogosphère et du marché de la vente d’image. Mais au vu du grand nombre de mails (genre beaucoup, beaucoup) que je reçois de la part de jeunes futurs photographes, je me dis que vous proposer un article complet sur mon expérience n’est peut-être pas une si mauvaise idée.
PRÉAMBULE
Je tiens à vous préciser qu’il ne s’agit pas là d’un guide pour devenir photographe. Et d’ailleurs, si quelqu’un vous proposait une marche à suivre pour vivre de la photo, il y a de grande chances pour que ça soit assez peu fiable. Cet article se base sur mon expérience de la photographie dans mon domaine de prédilection (le voyage) mais il existe une multitudes de profils de photographes, et de façons de gagner sa vie avec la photo !
J’AI COMMENCÉ PAR VOYAGER
L’histoire commence il y a 10 ans, en 2009. Je suis une jeune fille qui rêve d’aventure qui s’offre un voyage avec ses premières économies.
Pour ce voyage, j’achète mon premier appareil photo, un 450d, avec quelques optiques, dont un 100mm 2.8 que j’ai longtemps adoré pour les portraits (mais qui est tragiquement décédé pendant une traversée de l’Islande à vélo...).
Je n’ai alors jamais pris l’avion. Je m’envole vers Moscou pour entamer un périple de 3 semaines en transsibérien. On lit parfois que le voyage transforme les individus. Ce fut le cas. Quand je suis rentrée, je n’avais qu’une envie : repartir. J’avais pris le goût au voyage, à la photographie de voyage, aux rencontres, à l’excitation de l’inconnu, à l’adrénaline de la découverte.
À l’époque, je ne savais pas que ça pourrait un jour devenir un travail. Je gagnais bien ma vie et j’avais envie de tout voir. Chaque jour de congé était précieux ! Inde, Usa, Laos, Norvège, Écosse, Islande, Slovénie, Roumanie, Mali... J’ai littéralement dévoré le monde. C’est pendant ces voyages que j’ai appris ce que j’aimais photographier, et comment. J’ai appris à ralentir le rythme aussi, à me concentrer sur une région pour l’explorer en profondeur plutôt qu’à courir de ville en ville. Et dès le début, j’ai essayé de privilégié le logement chez l’habitant, parce que j’aimais ces rencontres, et ces moments de vie.
[toggle title=« Mon premier conseil aux aspirants photographes de voyage »]Inutile d’espérer convaincre un client avec un portfolio vide !
Si vous le pouvez, en sortie d’études, prenez un job, travaillez sans compter vos heures, économisez chaque centime, et prenez une année pour voyager... et faire des photos. Choisissez vos destinations avec précision, selon les sujets que vous voulez développer (de l’animalier ? du paysage ? des scènes de vie ?). Prenez votre temps, restez une semaine, deux semaines s’il le faut, pour avoir les photos que vous voulez. Apprivoisez vos goûts, vos envies, développez votre créativité.
Si l’option grand voyage n’est pas possible, ne négligez pas votre région. Vous voulez photographier des scènes de vie ? Faîtes les marchés, parcourez les centre-villes autour de chez vous. Vous rêvez de safaris ? Entraînez-vous sur les oiseaux migrateurs, les animaux qui peuplent les forêts. Votre truc c’est le portrait ? Allez voir les commerçants de votre quartier.
Bref, faîtes vos armes, remplissez vos cartes mémoire et votre portfolio.
Note : remplir son portfolio ne veut pas dire présenter 200 images à un client potentiel ! Cela signifie faire le plus d’images possible pour que celles que vous choisirez soient vraiment exceptionnelles. Le portfolio que vous présenterez doit toujours contenir le meilleur de votre travail photographique. C’est un échantillon qui doit donner envie. Limitez-le à un petit nombre de photos (pas plus de 20).
Souvenir de mon premier voyage de Moscou à Pékin en transsibérien.
Un petit mongol et une vendeuse de poisson au bord du lac Baïkal.
Photos telles que je les ai publiées il y a 10 ans. (que je travaillerai différemment aujourd’hui !)
LA QUESTION DE LA FORMATION
Personnellement, j’ai fait un BAC littéraire avec une option Arts (cinéma) + une deuxième option Arts facultative (à nouveau cinéma !). Pendant trois ans, au lycée, j’ai donc appris à faire des courts-métrages, étudié l’histoire du cinéma et l’histoire de l’art.
Puis, après avoir hésité entre une prépa et un BTS audiovisuel, j’ai choisi l’option me menant directement au boulot que je voulais alors faire : monteuse. Pendant deux ans, j’ai donc continué d’apprendre le cinéma, avec une alternance de cours sur les approches artistiques et de cours plus techniques sur l’optique, la lumière, etc. Une formation complète, en somme.
Fraîchement diplômée, je me suis installée à Paris. J’avais obtenu une équivalence en L3 pour poursuivre mes études le temps de trouver un boulot. Je pensais vivoter en tant qu’intermittente. Mon BTS était bien coté, j’ai eu deux propositions de boulot dès début septembre (dans des boîtes où je n’avais pas postulé, c’était sans doute plus facile à l’époque). J’ai choisi l’option CDI à plein temps, et, un an plus tard, j’étais dégoûtée à vie du milieu de la télévision ! Nous faisions des émissions plutôt qualitatives, mais les conditions de travail étaient déplorables.
J’ai démissionné pour commencer à travailler en freelance comme graphiste, et c’est à ce moment qu’un client m’a offert un poste de retoucheuse dans la presse magazine. J’y suis restée sept ans. C’est là que j’ai commencé la photographie professionnelle en faisant d’abord des natures mortes pour les magazines.
Je ne suis donc pas tout à fait autodidacte, puisque c’est mon parcours professionnel qui m’a menée là, et que j’ai appris à calculer des distances focales et des températures du lumière [...] dans mes études, mais je n’ai aucun diplôme spécifique à la photographie. Par contre, j’ai beaucoup étudié l’histoire de l’art, la construction d’une image, d’un tableau. Et je pense qu’exercer l’œil est capital dans la démarche d’un photographe (avoir d’autres images en tête que les photos d’Instagram toutes semblables !).
[toggle title=« Quelles études faire pour devenir photographe ? »]Il n’y a pas de réponse toute faite à cette question, malheureusement.
Il y a deux choses à savoir :
1. – On n’attend pas la même chose d’un photographe de mode et d’un photographe dans le tourisme, par exemple. Ce seront donc deux façons différentes de construire une carrière.
2. – Les choses les plus utiles, vous ne les apprendrez pas à l’école : la première qualité d’un photographe, c’est de savoir se vendre.
Aujourd’hui, vous trouverez une quantité de photographes médiocres qui réussissent parce qu’ils sont de bons commerciaux, et tout autant de photographes talentueux qui échouent parce qu’ils ne savent pas se mettre en valeur. Je le dis d’autant plus facilement que c’est, à titre personnel, mon plus grand soucis : je ne sais pas me vendre. Mais j’ai toujours eu la chance de voir les clients venir vers moi.
En bref, choisissez vos études en fonctions de vos goûts, vos attentes, votre personnalité. Mais personne ne s’est jamais vu refuser un contrat comme photographe parce qu’il n’avait pas le diplôme !
Si vous choisissez des études loin du domaine artistique, travaillez votre œil, votre culture générale : lisez des revues de photojournalisme, allez voir des expos (pas uniquement photo), prenez des cours de dessin, regardez des films. Et surtout, pratiquez. Personne ne naît photographe de génie : apprenez à maîtriser l’outil, les règles, la grammaire photographique. Travaillez, exercez-vous au quotidien.
SE FAIRE CONNAÎTRE, PUIS SE LANCER
C’est grâce à ce blog que ma carrière a débuté. Je partageais mes aventures et mes images ici, pour le plaisir, parce que j’aimais écrire. Et puis les premiers clients sont arrivés.
Parmi les tournants marquants des débuts, il y aura eu le premier prix reçu par le blog, à la Biennale du Carnet de Voyage de Clermont-Ferrand, puis une mission pour refaire la photothèque de l’antenne française de l’Office de Tourisme du Kenya et enfin un contrat de livre avec les Éditions Eyrolles, chez qui j’ai publié un livre consacré à la photo de voyage. Tout cela m’a fait comprendre que ça pouvait devenir mon métier, que je n’étais pas illégitime à rêver de devenir photographe.
Me sentir légitime, encore aujourd’hui, n’est pas toujours aisé pour moi. Et j’ai constaté que c’était un trait commun avec beaucoup de collègues féminines. On nous apprend à être humble. Mais dans les métiers artistiques, l’humilité n’est pas une qualité : il faut savoir se vendre.
Avec le temps, le blog a grossi. C’est lui qui me sert de vitrine. J’ai donné des interviews sur des radios nationales, à la télévision. De nombreux magazines ont parlé de mon travail. Aujourd’hui encore, c’est grâce au blog que mes clients me contactent, c’est mon meilleur atout. C’est aussi ce qui me correspond le mieux : je ne sais pas débarquer quelque part avec mon portfolio sous le bras et expliquer combien je suis extraordinaire !
[toggle title=« Mes conseils pour se faire connaître »]Se rendre visible, ça veut dire être présent sur les réseaux sociaux, avoir un site. Mais ça ne garantit pas que des gens vont voir le-dit site, ni les publications sur les réseaux sociaux.
J’ai eu la chance d’être présente au bon moment. J’ai pu me faire un nom avant que la blogosphère voyage soit saturée. Aujourd’hui, c’est bien plus compliqué, même lorsqu’on est talentueux.
Certains misent tout sur Instagram, où on devient influent contre quelques dollars. Mais je vous conseillerais plutôt de vous démarquer. Trouvez votre style, votre façon de communiquer. Ne soyez pas l’énième ciré jaune ou fille à chapeau. N’utilisez pas les recettes d’instagram. Oubliez ces noirs délavés, ces teintes orangées. L’uniformité d’Instagram est l’ennemie de la créativité.
Faîtes ressortir votre personnalité. Et ne comptez pas vos heures. Entre mon premier voyage et mon premier contrat, il n’est passé plusieurs années.
Souvenir du Kenya
TRAVAILLER POUR LA PRESSE
Quand on évoque la photographie de voyage, on pense immédiatement à la presse. Bosser dans un magazine, être reporter, voir ses images sur papier glacé dans un kiosque à journaux, ça fait forcément rêver. Pour autant, je n’ai jamais été l’instigatrice de mes publications dans la presse.
J’ai essayé trois fois de contacter des magazines.
- La première fois, j’ai simplement montré mon portfolio au directeur artistique d’un des magazines pour lesquels je bossais en tant que retoucheuse. Il avait déjà utilisé quelques unes de mes photos, en pleine page, pour ses sommaires. Je lui ai simplement demandé s’il voulait bien regarder, et à l’occasion me laisser tenter ma chance. Travaillant pour le magazine, je savais qu’une grande partie de leurs photographes n’étaient pas très bons (puisque je passais mon temps à devoir limiter les dégâts sur leurs photos ratées). Et le directeur artistique a démoli toutes mes photos : tout était mauvais, rien ne trouvait grâce à ses yeux. C’était assez terrible à entendre. À ce moment précis, une collègue est rentrée dans la pièce et a dit « oh, c’est super beau ces photos, c’est qui ?». Le DA a fermé mon portfolio sans répondre. Et nous n’en avons plus jamais reparlé. Je n’ai jamais su pourquoi il avait réagi de la sorte. Un simple « désolé, c’est pas le style du magazine » aurait suffit. Pourquoi mes photos étaient-elles si nulles ?
- La deuxième fois ne fut guère plus glorieuse. J’étais déjà à mon compte. Je connaissais cette rédactrice en chef depuis plusieurs années. Au détour d’une conversation, j’ai demandé s’ils cherchaient de nouveaux photographes de temps en temps. La réponse fut aussi sèche que rapide, me faisant bien comprendre que je devrais me sentir honteuse d’avoir eu l’outrecuidance de penser être digne de son magazine. Bon, ok.
- La troisième fois, c’était l’an passé. Un magazine a posté une annonce cherchant quelqu’un sachant photographier, faire des vidéos et utiliser les réseaux sociaux. J’ai répondu, avec un long mail détaillant ce que nous pourrions imaginer ensemble. J’avais plein d’idées, j’étais motivée ! J’ai reçu un mail impersonnel quelques mois plus tard. Je soupçonne que l’annonce fut en réalité une façon de faire de la publicité : poster sur facebook une annonce « job de rêve » c’est un bon moyen d’être partagé des milliers de fois !
Ce que j’ai observé du temps où je travaillais dans la presse comme retoucheuse, et même maintenant en côtoyant le milieu du tourisme, c’est que les places sont chères, et que les obtenir n’est pas tant une question de compétences que de relationnel. Connaître les bonnes personnes, en somme. Et de la bonne manière.
Je travaille de temps en temps avec la presse, malgré tout : quand ce sont eux qui viennent me chercher.
J’ai même commencé récemment une collaboration sur le long terme avec un nouveau magazine, Terra Darwin, dans lequel je publierai régulièrement des carnets de voyage.
Trouvez-vous d’autres clients ! Il est même probable que vous soyez ainsi mieux payés qu’en tant que photographe pour un magazine !
Si vous avez un super reportage dont aucun magazine ne veut, publiez-le sur le web.
Si vous voulez faire un livre, autopubliez-vous ! Quitte à faire une campagne de crowdfunding pour financer l’impression !
Bref, vous n’êtes pas dépendant de la presse, vous pouvez créer votre média, votre moyen de diffusion, vous-même.
Une de mes premières belles collaborations avec un magazine : couverture et une douzaine de pages à l’intérieur
TROUVER DES CLIENTS ET GAGNER SA VIE
J’ai commencé à avoir plus de propositions en tant que photographe (ou blogueuse) pile quand je commençais à ne plus supporter mon travail salarié. Je n’avais plus assez de jours de congés pour accepter toutes les propositions qui me plaisaient ! J’ai négocié mon départ de sorte à bénéficier d’un licenciement à l’amiable : c’est un détail non négligeable qui permet de se lancer en toute confiance, en sachant qu’on aura toujours de quoi payer à manger. En 2013, j’étais libre de tout contrat de travail et prête à me lancer !
L’avantage de ce métier, c’est que tout est exponentiel. Ainsi, aujourd’hui, mes photos sont dans de nombreuses brochures d’Offices de Tourisme ou d’Agences de Voyage, et ça me permet de gagner en crédibilité et en visibilité pour obtenir d’autres contrats similaires. Il n’y a rien de mieux que d’être à une rencontre avec des professionnels du tourisme et de pointer le stand d’une destination en disant « vous voyez le kakémono là-bas ? Hé bien c’est ma photo ! ».
Au fur et à mesure, je fais aussi évoluer ma façon de travailler. Ainsi, les dernières années, j’ai recommencé à intégrer de la vidéo afin d’avoir une corde de plus à mon arc (des photographes qui savent prendre de jolies photos, y’en a plein, mais qui savent aussi faire de la vidéo, ça réduit tout de suite le marché). En devant maman, je me suis également spécialisée de plus en plus dans les thématiques familles. D’une part, parce que ça m’offre le confort non négligeable de, souvent, faire découvrir le monde à ma fille, et d’autre part parce que c’est une thématique que j’apprécie particulièrement. La sincérité des enfants fait qu’ils ne sont pas toujours faciles à filmer. Il n’y a pas de mise en scène avec eux. Il faut les mettre en confiance, développer une complicité, mettre en place les scènes qu’on veut, être réactif pour saisir leurs expressions. Ce sont des sujets extraordinaires à immortaliser, même quand ce sont les enfants des autres !
[toggle title=« Mes conseils pour trouver des clients »]Puisque c’est le fond du problème : qui peut avoir de l’argent, et avoir envie de vous acheter une photo ?
Là encore, il y a plusieurs modèles économiques qui différent selon les profils. L’idéal étant à mon sens de piocher un peu partout, surtout pour débuter !
Vous pouvez vous spécialiser dans la vente de tirages d’art. Cela suppose de faire des photos que les gens pourraient être susceptibles d’afficher dans leur salon. La difficulté résidera dans le fait de trouver des galeristes chez qui exposer, ou que des gens visitent votre site web si vous voulez vendre en direct.
Vous pouvez contacter les chambres d’hôtes ou les petits hôtels de votre région. Repérez sur AinBnB, Booking ou sur Google ceux qui ont des photos qui ne valorisent pas leurs établissements, et proposez-leurs vos services. Mais retenez-vous de commencer votre mail par « vos photos sont tellement moches que je pense que vous pourriez avoir besoin de moi » !
Plus vous photographierez des hébergements, plus vous pourrez prétendre à de beaux contrats, et augmenter vos tarifs.
Faites-vous connaître des agences de voyage, prestataires touristiques et offices de tourisme autour de chez vous. Surtout dans certaines zones rurales, il est possible que peu de photographes sont actifs. Ainsi, le jour où leur photographe attitré ne sera pas disponible, ils penseront peut-être à vous.
Enfin, au fil du temps, spécialisez-vous. Devenez la personne qu’on appelle pour un sujet précis. Ça ne vous empêchera pas de faire de tout, mais ça vous rendra expert dans un domaine.
Deux vidéos de commande sur la thématique famille, pour l’agence Terres d’Aventure de l’Office du Tourisme du Forez
LA QUESTION DES TARIFS
Ancienne graphiste, je savais, en me lançant comme photographe, que le travail gratuit serait toujours à proscrire. Cela ne m’a pas empêchée de me faire avoir, ou parfois simplement d’être déçue. J’ai ainsi, notamment, réalisé une vidéo pour une association dont j’aimais bien le travail. C’est une petite association, mes contacts y étaient tous bénévoles. Je l’ai fait gratuitement, en toute liberté, et c’était un chouette projet. Mais quand j’ai vu, quelque mois plus tard, qu’ils avaient du budget pour financer d’autres vidéos, ça m’a fait mal au cœur. Le problème, c’est qu’ils n’ont même pas envisagé de me proposer de concourir pour l’appel d’offres. J’aurais pu le rater, être moins compétente que ceux qui l’ont remporté, ça ne m’aurait pas gênée. Mais j’ai enragé qu’ils ne m’écrivent même pas.
Cette anecdote résume bien tout le problème du travail gratuit : dès lors que vous le faîtes une fois, les gens ne vous envisagent plus comme un professionnel qu’ils pourraient rémunérer.
Demander une rémunération pour son travail, c’est indispensable pour créer un rapport professionnel.
[toggle title=« Combien vendre une prestation photo ? »]Toutefois, si vous vendez un reportage, calculez votre ratio prix/journée : si vous partez trois jours, passez deux jours à trier/retoucher 60 photos, et qu’on vous offre 200€, ça ne va clairement pas. Vous gagneriez bien moins que le SMIC !
De manière générale, ne descendez jamais en dessous de 250€/jour de travail.
Sachez également que le prix d’une photo diffère selon son utilisation. Une petite image dans une page intérieure ne vend pas le même prix d’une couverture.
Pensez qu’un photographe indépendant paie des charges/impôts (variables selon les statuts), n’a pas de congés payés, pas de congé maladie, n’est pas payé pour les journées dédiées à la comptabilité, aux rendez-vous. De plus, veillez à toujours garder un fond de roulement en cas de soucis avec votre matériel (si vous deviez racheter un appareil en urgence, investir dans une optique, etc.).
Pour toutes ces raisons, en dessous de 250€/jour de reportage, vous risquez de vous retrouver sur la paille.
LES PETITS BOUTS DE FICELLES FONT LES GROSSES CORDES
Aujourd’hui, je multiplie les sources de revenu, et ça m’assure une certaine stabilité, pour ne pas dépendre intégralement des commandes. J’ai un modèle économique à cheval sur plein de profils, et ça me va bien.
Ma plus grosse source de revenu reste la vente de reportages à des destinations et agences de voyages. Selon les contrats, cela signifiera faire des photos ou des vidéos (ou les deux). Parfois, il s’agira de publier en plus un billet sur ce blog. La double casquette photographe-blogueuse me permet d’inclure plus d’options, en leur offrant de la visibilité en plus du contenu !
Je vends également des photos à des entreprises ou des magazines qui ont aimé mon travail en le voyant sur internet.
J’ai, par exemple, vendu plusieurs photos à une marque de Saumon pour ses packagings...
(ma photo, c’est celle du village norvégien, hein, pas celle du poisson mort !)
Et voici deux autres magazines qui m’ont contactée pour utiliser une de mes photos en couverture.
Je gagne un peu d’argent via l’affiliation. Cela consiste à placer des liens sur ce blog, vers des plateformes qui me verseront des commissions. C’est le cas d’Amazon ou de Booking, par exemple. Pour de gros sites, cela peut rapporter beaucoup d’argent. Dans mon cas, cela restera anecdotique puisque je ne le fais que sur des produits et services que j’ai réellement testés / aimés (sur mon matériel photo par exemple). De plus, j’ai toujours un problème éthique à renvoyer vers ces entreprises, et je limite donc leur présence...
J’organise des voyages photo. C’est à dire que des gens peuvent venir avec moi en voyage pour apprendre la photo. Mais soyons honnêtes : je le fais pour le plaisir ! Je voulais proposer ces voyages à des tarifs les plus accessibles possibles. Entre l’argent investi dans les repérages et le temps dépensé dans l’organisation, ce n’est clairement pas comme ça que je vais m’acheter une Rollex. Mais partager une semaine avec des passionnés, échanger autour de la photo, les voir s’éclater à essayer de nouvelles techniques... ça vaut largement le coup !
Parallèlement, je donne aussi des formations à des professionnels du tourisme : je leur apprends à réaliser eux-mêmes leurs vidéos, à améliorer leurs photos.
Enfin, il y a les publications de livres. J’ai publié trois ouvrages dédiés à la photographie de voyage.
Le premier était auto-édité. Je l’ai vendu moi-même pendant 6 mois avant de le rééditer chez Eyrolles. Mes droits d’auteurs sont bien moindres en ayant un éditeur, mais le livre se vend très bien depuis plusieurs années, sans rien faire : c’est un revenu passif confortable (là où l’autoédition suppose des trajets quotidiens jusqu’à la Poste et une gestion des stocks !).
Enfin, j’ai publié un nouveau livre en décembre, à nouveau en auto-édition. Cela signifie que j’avance tous les frais moi-même : payer l’imprimeur, c’est une petite fortune ! Mais cela veut aussi dire que je garde tous les bénéfices pour moi (même si la Poste touche plus que moi...).
Aujourd’hui, je vis bien. Je refuse les contrats qui ne me plaisent pas. C’est une chance.
Luxe suprême, j’ai un boulot qui me plaît, et du temps pour ma fille. Je peux aller la chercher à l’école à 16h30, être avec elle le mercredi. En contrepartie, je cours beaucoup. Je travaille tard le soir, quand elle dort (ou tôt le matin, selon les semaines). Et comme beaucoup de mamans actives, j’ai l’impression de vivre deux journées en une sans jamais avoir le temps de prendre du temps pour moi.
Bref, c’est un métier formidable, il faut juste le choisir pour les bonnes raisons ! Et surtout, se savoir que, derrière les jolies images, il y a beaucoup, beaucoup, beaucoup d’heures derrière un ordinateur.
Deux photos prises pendant le premier stage photo que j’ai animé en Écosse
42 commentaires
Merci pour ce partage d’expérience, c’est très intéressant ! Et tes photos sont vraiment magnifiques, tout comme tes récits de voyage qui ont été une vraie source d’inspiration, notamment ceux liés à l’ouest canadien et à Malte. Merci 😉
Pourtant Malte, c’est clairement pas un endroit que j’ai aimé 😀
Bonjour je me nomme Patrick j’ai 60 ans et j’ai toujours été passionnée de photographie ça qui me passionne plutôt la photo de voyage et tourisme et j’aimerais me relancer dans la photo et quel genre d’appareil photo me proposer vous comme je suis beaucoup intéressé par le Nikon D500 ou le D810 au plaisir Patrick
J’aime beaucoup la sincérité avec laquelle tu t’exprimes sur cet aspect de la photographie.
Les gens ont souvent l’impression que c’est un boulot qui n’a que des avantages, mais il y a des côtés moins sexy à ce job de rêve...
Prendre des photos s’est tellement banalisé que souvent, la qualité du travail n’est pas rémunérée à sa juste valeur. Quand on mesure l’investissement en matériel, aux innombrables heures passées à se former, à pratiquer, à publier sur les réseaux...certains ne sont vraiment pas cher payés...
Comme tu le dis si bien, le mieux est de se différencier, en trouvant son propre style, et surtout de ne pas suivre ces pseudo-tendances sur Instagram !
Si ça peut aider quelques futurs photographes, tant mieux 🙂
Bonjour,
Merci pour cet article et ce retour d’expérience, avec les conseils qui vont avec !
Avec plaisir 🙂
Dire que hier j’ai ouvert un brouillon et que j’ai commencé à noter des idées qui ressemblent à ce billet. Mon article sortira un jour quand j’aurais pris le temps de le finir 😉
Il faut insister sur le cout du travail gratuit, on ne le dit jamais assez je crois. Comme fumer tue sur les paquets de cigarettes cela devrait être inscrit sur les emballages du matériel photo
Ahahah !
« votre appareil s’autodétruira si vous donner des images gratuitement à une organisation commerciale » 😀
Moi qui rêve de me lancer en pigiste/freelance dans les mois à venir cet article tombe bien ! Il est hyper bien expliqué et détaillé ! Merci pour ces précieuses infos 🙂
Bon courage à toi 🙂
Bonjour Aurélie, merci pour cet article hyper complet et intéressant. J’ajouterai une question qui ne me vient que maintenant : comment pratiques tu la photo quand tu voyages en compagnie de gens qui ne sont pas aussi passionnés que toi ? J’aime vraiment la photo, j’ai pris quelques cours, j’aimerai m’améliorer, mais quand je voyage en couple ou avec des amis je n’ose pas leur « imposer » de prendre le temps de réfléchir cadrage, couleurs, compositions... Bref, as-tu des astuces à nous confier dans cette situation ?
Merci pour ton aide et le partage de tes connaissances en tout cas !
J’avais écrit jadis, un article sur ce sujet. C’est franchement compliqué, et très variable selon les personnalités avec qui tu voyages. Pour certains, qui aiment prendre leur temps, et éviter la foule, voyager avec un photographe est plutôt une bonne chose. Pour d’autres, c’est ingérable.
Personnellement, j’ai toujours tenté les compromis : prendre du temps en solo, pour que chacun puisse faire comme bon lui semble. Et inclure les autres dans sa passion : les photographier aussi.
Merci pour cet honnête retour d’expérience, qui nous rassure un peu. C’est rassurant de voir que ceci ou cela n’arrive pas qu’à nous. Ce genre de pensée est difficile à bannir quand on travaille derrière son ordinateur sans pouvoir discuter avec des collègues quand le besoin est là.
Rien n’arrive sans peine, tout le monde passe par des galères et des coups durs, et c’est important de le rappeler !
Au plaisir de se croiser, un jour ou l’autre : )
Oui, ces périodes de coup de blues (en hiver...) où chacun déprime dans son coin, alors qu’en fait c’est pareil pour tout le monde 😀
Merci pour cet article sincère et juste !
Avec plaisir 🙂
Merci de nous permettre d’en savoir plus sur ce métier de rêve !
Merci à vous 🙂
Ho comme cet article est génial !! Tu as parfaitement expliqué et résumé ton métier et je m’y reconnais parfaitement. En effet c’est selon moi l’un des plus beaux métiers du monde que l’on a la chance de faire, certes, mais les gens autour oublient souvent tout le travail que ça représente derrière, surtout en auto-entrepreneur (d’où l’incompréhension générale concernant les tarifs que l’on annonce aux clients).
En tout cas c’est un très beau parcours que tu as là et il prouve ta passion, ton courage et les nombreuses années de travail. Alors bravo à toi 🙂
Merci 🙂
Coucou Aurélie, merci pour cet article qui permet de se rendre compte des choses dans leur réalité. Ça semble très sincère et basé sur ton expérience, c’est l’essentiel ! En tout cas un superbe parcours, bravo ?
Bonne continuation
Sylvain
Je pense que c’est important, pour les gens qui rêvent de devenir photographe, de savoir ce que ça signifie vraiment 🙂
Très intéressant d’en savoir un peu plus sur ton parcours.
Je crois que c’est l’article sur lequel j’ai passé le plus de temps sur ton site ! Je t’encourage à écrire d’autres articles du genre, c’est très intéressant !
Y
Merci pour cet article ! Et au delà des informations, j’ai découvert de magnifiques photos 🙂
Merci pour cet article ça me fait un peu rêver ! Je pense souvent à me lancer professionnellement dans la photo, mon métier médical me prend beaucoup d’énergie et je pense tout le temps à changer de vie. Je suis passionnée de photographie depuis plusieurs années et de voyages, je rêverai de faire ton metier c’est tout ce que j’aime, voyager ma passion première, et bosser pour des magazine ou faire des livres photos ! Le rêve
J’ai pas mal de photo à mon actif, j’aime le côté artistique de la photographie surtout. Mais j’aime faire de tout.. payage animalier portrait .. donc c’est peut être trop vague. Mais je peux du coup montrer les multiples beautés d’un pays. J’imprime déjà régulièrement mes photos pour mes proches et je fais des livres photos des pays que je visite.. mais je les garde pour moi, j’aimerai avoir la force de me lancer comme toi et d’avoir autant de chance ( de talent bien sur) que toi !
De ce que je comprend déjà c’est qu’un blog ça aide beaucoup ! Donc je vais y réfléchir !
Bravo pour ton travail !!! Et merci pour cet article
Plein d’idées , une sincérité et franchise peu communes agréable à lire .Moi qui me lance j’ai encore beaucoup à apprendre ..
Merci pour ce partage. C’était vraiment très intéressant et instructif. En pleine réflexion sur un changement de carrière, expérience de vie que vous présentez me conforte dans l’idée que cela n’est pas simple, mais reste envisageable.
Un vrai plaisir à lire et comme d’hab un régal pour les yeux. Merci pour ce partage sincère et très instructif.
Bravo et merci pour ce partage. J’apprécie beaucoup votre style qui m’a permis de vous lire jusqu’au bout (et c’est rare) Votre franchise et votre humour rendent très intéressante votre ascension professionnelle avec ce témoignage qui rend compte sans rancœur des difficultés rencontrées malgré vos compétences avant de vous épanouir dans une activité lucrative Je vous souhaite une bonne continuation, de beaux voyages et de merveilleuses images
Une réflexion très lucide sur le métier de photographe et une bonne analyse d’un de ses aspects qui fait le plus rêver ! Votre expérience devrait logiquement faire réfléchir ceux qui voudraient se lancer dans ce métier sans pour autant les décourager.
J’ai pris plaisir à vous lire 🙂
Bravo pour cet article ! Et merci ! C’est sincère et réaliste, ça fait du bien ! Bravo pour ton merveilleux blog !
Merci de partager ton parcours et tes conseils avec nous. Très intéressant.
Il y a une petite coquille dans la paragraphe « Trouver des clients... » : « En devant maman ».
bonjour,
j’aimerai recevoir vos newsletters, je suis photographe et vidéaste, j’aime suivre la communauté des femmes qui nous partagent leur passion.
bonne journée
Merci pour ton article et pour tes conseils vraiment instructifs. Lorsque tu nous recommandes de travailler pour la presse, j’ai tout de suite pensé à Peter Parker (Spider-Man). Plaisanteries à part, je voulais te dire que tes clichés sont magnifiques. Tu es très douée.
Merci pour cet article c’était très passionnant et construit ça me donne encore plus envie d’être dans ce métier ( qui est à mes yeux le beau art d’image avec le 7 ème art, la peinture et le dessin ) vive l’art et vive la réussite ! Et encore un grand merci
Tout d abord félicitation pour votre Blog et merci pour votre article. Je cherchais des témoignages comme le votre afin de me donner des pistes.
Etant passionné de voyage je parcours le monde depuis depuis année et je travaille actuellement sur ma reconversion dans le monde de la photo et du tourisme (surtout animalier). Evidemment qu il y a des difficultés et des peurs a surmonter mais si c est le prix de la joie et de la liberté ...
Encore Merci
Je me cherche depuis longtemp, je n ai jamais vraiment sue quel métier je voulais faire celui qui me correspondrais le plus ‚je suis clairement passionnée de voyage et la photo c est quelque chose qui m a toujours passionnée également, alors cette fois je pence savoir ver quoi m orienter et cet article m’a aidée, seulement je suis une parfaite débutante en photographie je ne sais par ou et quoi commencer ‚une formation ‚un stage ‚quel appareil acheter ...si tu a un conseil je suis preneuse ‚merci d avance
Je suis un grand passionné de photographie depuis longtemps et j’ai pratiqué de la photo amateur en utilisant comme appareil photo minolta et Olympus et depuis quelques années je suis beaucoup intéressé par la photographie de voyage et tourisme qui me passionne beaucoup et envisage de me procurer un appareil photo Nikon professionnel le D500 pour me relancer dans la photographie au plaisir Patrick
Magnifique blog ~ merci pour ce touchant et inspirant partage ~ belle et heureuse continuation 😉🕉🌏🧘♀️💫🍀
Bonsoir,
J’ai commencé à lire un peu votre blog, passionnant et intéressant, je pense y revenir quelques fois dessus afin d’assimiler un peu plus vos informations.
Je suis également un passionné de photo, et mes voyages se concentrent pour l’instant sur La France. Avant d’en faire plus, me lancer un peu plus à fond dans cette passion, je souhaiterai dans la mesure du possible avoir au moins déjà un avis sur mes photos...
Merci encore et à bientôt peut-être
Cordialement
Patrice