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Mali épisode 6 : ne pas voir les hippopotames à Markala

par Madame Oreille

Je le confesse, je vou­lais voir des hip­po­po­tames. J’a­vais renon­cé aux élé­phants du Gour­ma pour cause de mecs bizarres et armés der­rière les dunes, mais je comp­tais quand même sur d’autres pachy­dermes aqua­philes. Le titre de cet article vous donne cepen­dant un indice quant au résul­tat de cette quête...

Comme nous étions héber­gés chez l’ha­bi­tant grâce à La Case à Voyage, nous avions un contact à Mar­ka­la. Et c’est d’ailleurs uni­que­ment par ce biais que nous avons décou­vert la ville et déci­dé d’y aller.
On y trouve le plus grand bar­rage du Mali, des­ti­né à rete­nir de l’eau (bah oui) pour les cultures des alen­tours ; et c’est à peu près la seule curio­si­té locale, hor­mis un fes­ti­val de marion­nettes qui a lieu plus tard dans l’an­née. Mais c’est ce qui nous plai­sait : une petite ville au bord du Niger !

S’y rendre fut éton­ne­ment facile. Ça com­mence pour­tant mal : Sidi­bé, le papa, était sur répon­deur. Impos­sible de pré­ve­nir de notre arri­vée. Comme nous avions l’a­dresse, nous avons déci­dé d’y aller quand même, quitte à dor­mir à l’hô­tel. Nous par­tons de Ségou tôt le matin et à peine nous attei­gnons le gou­dron qu’un mini­bus ralen­tit devant nous. Le Belge crie « Mar­ka­la », le chauf­feur nous fait signe, et nous voi­là en route, sur­pris par la rapidité !

Comme à chaque fois, on s’ar­rête toutes les cinq minutes pour faire mon­ter ou des­cendre des gens et des sacs de riz, et le pla­fond, fait d’un simple bout de tôle rouillée repeinte, tremble à chaque sac char­gé. Nous le fixons, pas très en confiance, et ça amuse beau­coup nos voi­sines de derrière...

Mar­ka­la est en fait divi­sé en plu­sieurs quar­tiers, et on va décou­vrir à nos dépends qu’ils sont assez éloi­gnés. Nous mar­chons long­temps avant de rejoindre le quar­tier de Kiran­go. On demande plu­sieurs fois notre route, his­toire d’être sûrs de notre direc­tion (tout droit, en fait, mais bon ; on se méfie, depuis l’Inde), se deman­dant si c’est vrai­ment une bonne idée de débar­quer dans un endroit pau­mé où on ne nous attend pas.
Il nous faut main­te­nant trou­ver la bonne rue, et la bonne mai­son. Et là encore, tout se déroule bien : nous deman­dons par hasard à un ami proche de la famille qui nous accom­pagne et nous pré­sente à Kha­di­ja, la femme de Sidi­bé. On lui explique qu’on n’a pas réus­si à les avoir au télé­phone, elle nous explique que son mari n’est pas là, mais qu’on peut res­ter sans sou­cis. Et là, on ren­contre une bande d’a­do­rables gar­çons qui s’af­fairent à vider la chambre de l’aî­né que nous occuperons.

Et après man­ger, ce sont jus­te­ment les gar­çons qui nous emmènent visi­ter le coin. Il y a bien une fille dans la fra­trie (!), heu­reu­se­ment, mais c’est la petite der­nière et elle marche à peine. Nous par­tons vers le bar­rage, en décou­vrant au pas­sage la « mai­son du ministre » (un mec ori­gi­naire du coin qui a une TRÈS belle baraque, gar­dée par le futur mari de leur cou­sine...), d’an­ciennes mai­sons colo­niales qui sont soit décré­pies soit ultra pro­té­gées par moult bar­be­lés. Et nous voi­là au bar­rage. En fait, Mar­ka­la a beau­coup souf­fert de la colo­ni­sa­tion, et le bar­rage s’est construit dans le sang et la sueur du tra­vail forcé...

Sur le retour, nous emprun­tons un autre che­min. A plu­sieurs reprises, nous sommes dépas­sés par des blancs dans de gros 4×4 quand, d’un coup, on voit pas­ser un pick-up rem­pli d’hommes armés enca­gou­lés. Sur le moment, j’ai un mou­ve­ment de recul. Mais ils pour­suivent leur route en nous fai­sant un signe de tête. Ama­dou nous explique que ce sont des mili­taires, qu’il y a un gros camp ici, et qu’ils partent vers le Nord (il y a eu une nou­velle attaque quelques jours plus tôt à Gao). On en regarde d’autres pas­ser, tou­jours impres­sion­nés. Il y a des gros machins mitrailleurs sur l’ar­rière des pick-up, et aucun n’a de réel uni­forme. Entre les cagoules et les vête­ments civils, ils ne sont fran­che­ment pas rassurants...

Le soir, nous ren­con­trons Sidi­bé, ren­tré de son voyage d’af­faires au Bur­ki­na. Je ne sau­rais vous résu­mer nos conver­sa­tions, mais c’est un homme pas­sion­nant (qui tra­vaille à l’adaptation des tech­niques de culture au réchauf­fe­ment cli­ma­tique, après s’être inté­res­sé aux domaines de l’é­co­lo­gie et du déve­lop­pe­ment durable) qui a su nous faire regret­ter de repar­tir si vite ! Il nous a ain­si pré­sen­té à l’ar­ti­san qui réa­lise les marion­nettes du fes­ti­val, puis à sa belle famille qui nous a par­lé de la période colo­niale (sans nous mettre mal à l’aise, il ne s’a­gis­sait pas de nous rendre cou­pable de quoi que ce soit, juste de racon­ter l’his­toire de la famille) et nous avons fini la soi­rée chez un ami à lui, à regar­der un match de la Coupe d’A­frique des Nations (je me sou­viens juste que les enfants encou­ra­geaient la Lybie).

Le gros point fort de Mar­ka­la, outre le calme et la super famille, c’est aus­si la faune. Nous sommes res­tés long­temps assis au bord du fleuve à regar­der les oiseaux. Mal­heu­reu­se­ment, aucun hip­po­po­tame ne mon­tre­ra le bout de son popo­tin... Enfin, il y avait des mar­tin-pêcheurs, c’est déjà bien ! (et puis des mou­tons, aussi...)

Le len­de­main matin, Sidi­bé nous a accom­pa­gné au mar­ché, l’oc­ca­sion de voir la ville en effer­ves­cence et de tes­ter les tuk-tuks col­lec­tifs où, tant que ça rentre, bah, ça rentre, avec des ins­crip­tions humo­ris­tiques des­sus... Le pro­prié­taire du « taxi cli­ma­ti­sé » trou­vait d’ailleurs sa blague très drôle ! Quelques jours plus tôt, nous avions éga­le­ment vu des pinasses cli­ma­ti­sées... L’hu­mour malien est assez proche de l’hu­mour fran­çais. Le second degré, qui marche dans peu de pays, passe ici très bien.

Et comme à chaque fois, il a fal­lu par­tir, sur une pro­messe inté­rieure de reve­nir, parce que c’é­tait tel­le­ment agréable, et sur­tout, parce que la famille était vrai­ment géniale. Des enfants hyper bien éle­vés, curieux, éveillés...

Dans le pro­chain épi­sode, nous pren­drons la direc­tion du Sud !

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14 commentaires

Minami-o 29 février 2012 - 10:20

Ah, un peu de chance dans vos dépla­ce­ments, ça équi­libre les 6h d’at­tente dans le bus collectif ! 😀
Sinon, encore de belles aven­tures, les Maliens ont vrai­ment l’air gen­tils avec les étran­gers, c’est ce qui res­sort de tes articles en tous cas...
Ah sinon, rien à voir, mais ton flux RSS est plan­té, enfin regarde toi-même en cli­quant sur le bou­ton en haut à gauche, moi depuis quelques temps mon agré­ga­teur me met­tait une erreur sur ton flux, là j’ai tes­té sur le site, et il me donne une erreur XML... C’est grave, docteur ? 😉

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Oreille 29 février 2012 - 22:21

Arf, la mise à jour word­press fait tou­jours plan­ter le RSS, et à chaque fois on oublie...

Sinon, oui, ils sont hyper gen­tils, et c’est tel­le­ment agréable d’a­voir une langue com­mune pour échan­ger. Je crois aus­si que l’hébergement chez l’ha­bi­tant nous a pas mal per­mis de pro­fi­ter du voyage sur l’axe « rencontre ». 🙂

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Donlope 1 mars 2012 - 8:27

Dom­mage pour les hip­pos, mais j’ai l’im­pres­sion qu’a­vec les ren­contres faites, vous n’y avez pas per­du au change ! Comme quoi, le voyage n’est pas tou­jours tel qu’on l’i­ma­gine et est sou­vent même mieux 🙂
Au pas­sage, la der­nière pho­to, le por­trait qui sert éga­le­ment de vignette est abso­lu­ment super­be­dans sa com­po comme dans ses cou­leurs, bravo !

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Curieuse Voyageuse 1 mars 2012 - 21:59

« Et comme à chaque fois, il a fal­lu par­tir, sur une pro­messe inté­rieure de reve­nir » c’est tel­le­ment vrai... je com­mence à en faire moins de pro­messes de ce genre : la liste est déjà trop longue pour ces 5 pro­chaines années 🙂

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Oreille 2 mars 2012 - 9:20

Don­lope : tout à fait, les ren­contres sont vrai­ment le point fort ! On fera un safa­ri en Tan­za­nie, pour com­pen­ser et voir des animaux 😀
Et ce gamin est ado­rable... Et comme le gamin ado­rable de Ségou, il s’ap­pelle Moha­med ! Ils ont tous les deux les yeux qui pétillent de malice !

Curieuse Voya­geuse : c’est pas faux... Mais je crois sin­cè­re­ment qu’on le fera, enfin j’es­père. Je me vois bien retour­ner au Mali avec des enfants, et retrou­ver les gens quelques années après, voir ce qu’ils sont deve­nus. On vou­drait faire la même chose en Mon­go­lie, où les contacts avaient aus­si été très impor­tants pour nous... Voir le pays sous un autre angle, à une autre saison...

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gaspard 2 mars 2012 - 10:06

Les pho­tos sont super (tou­jours très « chaude », dans les rouges, c’est très chouette) les cro­quis vrai­ment bons... mais qu’est-ce que tu attends pour faire un livre ?

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Oreille 2 mars 2012 - 13:31

Gas­pard : un édi­teur ? ^^ J’aime bien réchauf­fer mes pho­tos, c’est vrai, et je trouve que ça se prête bien à ces pays, avec la terre orange, par­fois hyper vive !

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gaspard 2 mars 2012 - 13:35

Oui, c’est vrai que c’est par­fait pour le sujet.
C’est tout a fait le genre de pho­tos qu’ils cherchent
en agence : propres, hyper colo­rés, chaudes...
Ca aus­si, tu devrais y penser.

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Oreille 2 mars 2012 - 14:16

Gas­pard, tu vas faire gon­fler mon égo, chut 😉 un jour je bou­ge­rai mes fesses et j’es­saye­rai tout ça !

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Rgs_ 2 mars 2012 - 16:02

Le por­trait du gosse est superbe !

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Oreille 2 mars 2012 - 17:33

Mer­ci Régis 🙂 (mal­heu­reu­se­ment, en grand, la mise au point n’est pas top :/ mais sur le blog ça passe !)

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Magali 2 mars 2012 - 22:48

Bon­jour,
Je viens de décou­vrir votre blog via la page face­book de La Case à Voyage. Une amie te moi même étions au Mali et au Séné­gal en Août/Septembre der­nier et avons logées dans de nom­breuses familles de La Case à Voyage. Quel bon­heur de voir comme les enfants de Las­sine ont gran­di ! C’est fou comme le petit Moham­med a chan­gé en si peu de temps ! Je me demande si la petite der­nière a autant chan­gé. Encore mer­ci pour ces quelques pho­tos qui me replongent avec nos­tal­gie dans le sou­ve­nirs de mon propre voyage ! Bonne continuation !

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Oreille 5 mars 2012 - 11:33

Maga­li : bon­jour et bien­ve­nue 🙂 ça doit être amu­sant de les voir gran­dir à dis­tance ! La petite pleu­rait en nous voyant (même si c’é­tait du ciné­ma pour retour­ner dans le dos de sa mère). Elle ne marche pas encore vrai­ment, mais com­mence ! ça va tel­le­ment vite à cet age là 😉
Je peux voir vos pho­tos quelque part ?

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Lamine 16 juin 2012 - 5:57

Bon­jour,
Quelle joie de lire quelques mots sym­pa sur mon vil­lage natal. Qu’il me manque ce beau petit coin si pauvre et à a fois si riche en hos­pi­ta­li­té, en ami­tié,... bref en huma­ni­té. Mal­heu­reu­se­ment, moi qui suis né en plein sahel sous des tem­pé­ra­tures de 30 à 40 degrés Cel­sius, vis à Que­bec au Cana­da. Mer­ci pour vos mots qui donnent dès fois des larmes aux yeux. Je suis de Dia­ma­ra­bou­gou donc un adver­saire voir un concur­rent de Kirango !!

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