Rencontre en Charente avec Pascal Renoux, artisan coutelier, Meilleur Ouvrier de France.
Été 2021, je sillonne le sud de la Charente.
En quittant Barbezieux, je m’arrête devant l’atelier de Pascal Renoux, un petit bâtiment qui ne paye pas de mine, entre un champ et des vignes.

Je frappe à la porte. On ouvre.
Pascal m’accueille chaleureusement, regard malicieux et muscles saillants. Je le suis à travers une première salle, remplie de machines que je ne connais pas. Il y a là tout ce qu’il faut pour travailler le métal.
Nous passons devant la forge avant de rejoindre un petit atelier. Des dizaines d’outils sont disposés autour des étaux. C’est ici que Pascal crée ses couteaux.
Le coutelier est avant tout un passionné et un autodidacte. Designer de formation, il s’est d’abord intéressé à la ferronnerie, en travaillant avec son beau-père, avant de découvrir le monde des couteaux, un peu par challenge, un peu par hasard. C’est le coup de foudre. La coutellerie lui permet de satisfaire son âme de touche-à-tout et de mêler son goût pour le dessin au plaisir du travail manuel. Il jongle ainsi entre toutes les disciplines nécessaires à la fabrication d’un couteau, du bout du manche à l’extrémité de la lame.
Il me parle tout de suite de son goût pour la récup’. Il ramasse des matériaux ou demande à ses clients d’en amener pour intégrer un peu d’histoire et d’émotion dans ses objets. Qui ne rêve pas d’un petit couteau de poche dont le manche aurait été taillé dans une branche de l’olivier qui poussait devant la maison de ses grands-parents ?
De temps à autre, au gré des occasions et des rencontres, Pascal prend aussi plaisir à restaurer de vieux couteaux. Donner une seconde vie à des objets conçus pour durer dans le temps, pour peu qu’on en prenne soin.

En 2018, Pascal Renoux a été sacré Meilleur Ouvrier de France, une récompense qui le rend toujours aussi heureux aujourd’hui. L’aboutissement de près de 20 ans à sans cesse se perfectionner, mais aussi trois années de sa vie consacrées à cette compétition.
Sa première tentative a été stoppée net par un cambriolage. La seconde a été mise à mal par le délai imposé. Finalement, c’est le troisième essai, après plus de 3200 heures de travail, qui lui a permis de l’emporter. L’épreuve consiste en la réalisation de trois couteaux sur un thème imposé. Pascal m’explique n’avoir vécu que pour ça pendant ces trois années, à s’en rendre malade, à y penser du matin au soir. Plus que le titre, c’est la reconnaissance par ses pairs qui lui importe, lui qui a tant le souci du détail.


Pascal me parle de son amour pour toutes les matières et matériaux qu’il est amené à travailler. Pour le manche, ce sera de l’os ou du bois. Des essences choisies avec soin et un goût prononcé pour le hêtre échauffé stabilisé : bois de hêtre sur lequel un champignon a créé des lignes, des zébrures et des coloris particulièrement esthétiques.
Pour la lame, ce sera de l’acier, produit directement à la forge. Pascal travaille notamment avec une technique (acier de Damas) qui consiste à assembler plusieurs aciers dont les différentes feuilles et couches créeront des motifs.
Il me raconte ses rencontres avec les clients, ce que leur choix en matière de couteau dit d’eux. Il y a ce client qui s’offre régulièrement des couteaux sans jamais les utiliser, juste pour les exposer à la maison. Il y a ceux qui veulent un petit couteau à avoir toujours sur soi, comme un souvenir nostalgique de l’habitude du grand-père. Il y a ceux qui veulent du discret, et ceux qui veulent du clinquant. Mais tous cherchent l’objet unique, personnel, et surtout, qui dure dans le temps.


Je retrouve chez Pascal un « défaut » que je connais bien. Il ne fait jamais les choses à moitié. Ainsi, quand il a commencé la musculation pour prendre soin de son dos d’artisan souvent courbé sur son travail, il s’est rapidement retrouvé culturiste. Et il en est de même avec son métier. La coutellerie lui a permis de maîtriser un ensemble de techniques, de la forge à la menuiserie, en passant par la gravure ou la mécanique pour les couteaux pliants. Et c’est donc naturellement qu’il s’est ensuite lancé dans la joaillerie.
Ces compétences lui permettent d’être totalement indépendant dans ses créations. Il a ainsi conçu une série de couteaux à ouverture secrète : à la façon des Himitsu-Bako*Himitsu-BakoBoîte secrète japonaise en bois qui ne s’ouvre qu’après avoir réalisé une série de combinaisons complexes activant des mécanismes cachés., les manches révèlent, pour qui sait les ouvrir des petites cachettes garnies d’ornements.
Lorsque je quitte Pascal, le natif de Charente a posé ses couteaux, le temps de créer quelques perles en verre. Il les utilisera ensuite pour les bracelets, colliers et boucles d’oreilles qui rejoindront les couteaux exposés dans la boutique, à côté de l’atelier.
Pascal Renoux – Coutelier
3 rue de la métallerie Champ des Rivaux
16300 Barret
Vérifiez les jours et horaires d’ouverture sur le site web.

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